Laurent Kloetzer's Blog, page 46
September 21, 2016
les 24 heures de lecture de Romainmôtier

Voici Hélendrude. On peut préférer l’appeler Elyndruda, ce qui sonne mieux, peut-être, à nos oreilles, et choisir en toute impunité de maquiller ses traits, de la décrire comme ceci ou comme cela, et reconstituer autour d’elle un monde bâti de matériaux imaginaires, ombres de pierres, ombres d’eaux et de carpes énormes, ombre de l’ombre des arbres centenaires... (Hildegarde, de Léo Henry)
et cela pendant une heure de merveilleux rhénan, à haute voix, comme tout ce qui a suivi. Puis l'heure suivante, nous avons lu des pièces autobiographiques, bien plus locales. Puis l'heure d'après, dans une vieille grange de ferme, un extrait de manuel de jeu de rôle, des textes de slam et une nouvelle extraite de Tadjélé. Et comme ça, à chaque heure son lieu et sa lecture. Toujours dans la grange, les aventures du faux Juif Iohann Moritz, puis à a galerie d'art du village le jour du chien, puis le labyrinthe, et la science du concret selon Levi-Strauss. Après le repas, nous sommes allés dans la chapelle au-dessus de l'abbatiale écouter les naturalistes à l’affût, puis préparer une mise en scène de théâtre dans la salle du conseil de la municipalité. Il était minuit. La grande traversée des heures noires commençait, avec Proust, Boulgakov puis Michel Butor et Sato Haruo, entendu à l'intérieur de la vieille tour de l'horloge. Dans la boulangerie, on a lu Rimbaud et les aphorismes de Vinceannet Girod. Dans la salle des chevaliers du prieuré, un essai sur l'histoire de la douleur et un conte théâtral sur la folie du pouvoir. Le soleil se levait, et on n'en avait pas fini. Accompagnés de la musique du Setar, nous avons lu le sommaire de la règle de Saint-Benoît, des quatrains mystiques de Djalâl ad-Dîn Rûmî, et des extraits de l'apocalypse de Saint-Jean, installés autour d'une grande table de la maison de la dîme. Il n'y avait plus que deux auditeurs encore debout à neuf heures pour écouter Murakami, gloire leur soit rendue ! Heureusement, des renforts sont arrivés pour entendre Jules Vernes, Annie Ernaux puis Zoé Valdès sous les toits du miroir aux fées.
"Merci, ai-je répété". J'ai remarqué que ce mot avait été le dernier prononcé en quittant mon pays, et le premier que je disais en arrivant dans un pays qui ne m'était pas totalement inconnu car je l'avais déjà parcouru de façon littéraire. (...)
David a pris place à côté du chauffeur. Hannah Irene s'est assise derrière, entre ses deux mamans.
L'auto a traversé la nuit vers un autre rêve plus palpable. Un voyage enfin dans la bonne direction. (La nuit à rebours, Zoé Valdès)

Il pleuvait et il faisait froid ce dimanche du jeûne fédéral à deux heures de l'après-midi, mais nous avions terminé notre tour d'horloge. Merci à tous ceux qui sont venus participer à notre course de relais immobile : hôtes et hôtesses, lectrices et lecteurs, auditrices et auditeurs, pour la journée, pour la nuit, ou simplement pour une heure. C'était bien.L'année prochaine, on recommencera.


Published on September 21, 2016 01:23
September 13, 2016
R.G. -- Pierre Dragon & Frederik Peeters
Je continue donc mon marathon Peeters, avec quelque chose de tout à fait différent. R.G. est une adaptation et une scénarisation par Peeters de récits que lui a fait Pierre Dragon, policiers aux renseignements généraux, du temps où cette très française institution existait encore.
Dans les deux volumes que j'ai lus (y en a-t-il d'autres ?), on suit deux enquêtes de Pierre Dragon et de ses collègues, qui, dans le premier, enquêtent sur des trafics internationaux (sweaters, limousines, chauffeurs), et dans le second sur la traite d'êtres humains.
Une fois de plus, le dessin de Peeters est remarquable, collant en finesse aux personnages, aux ambiances. On étouffe dans la camionnette de surveillance, on se cogne dans les petits bureaux, on visite toutes sortes de milieux, échanges de vêtements fabriqués dans des sweat shops dans des banlieues anonymes, fêtes au Crillon, poursuite sur les toits de Paris. Le tout dans une ambiance classique et pas désagréable de polar à la française. Les auteurs prétendent que presque tout est vrai, sinon les détails, et on veut bien les croire. Certaines anecdotes sont vraiment drôles ou tragiques, c'est selon.Ce que ça dit de notre monde, de sa criminalité compliquée, des liens qui s'étendent très vite au-delà des frontières, tout ça est à la fois fascinant et effrayant, et cohérent avec ce qu'a pu me raconter un ami qui gravite dans un milieu similaire.Je le redis, même si je n'ai pas tellement aimé ses histoires de SF, Frederik Peeters a un talent étonnant à rendre les échanges humains, regards, attitudes, sourires en coin, menaces... Tout sonne juste.
Bref, une bonne lecture, que je recommande (chaque volume se tenant assez bien tout seul, narrativement parlant).
Avec un peu de recul, on sent Peeters très intéressé par les personnages d'hommes. Trentenaire looser dans Lupus, quarantenaire divorcé dans Aâma, et balaise super-viril-mais-sensible dans R.G. (divorcé aussi). Le traitement dans R.G. des ambiances de vestiaire, amitiés sincères mais pudiques, blagues un peu lourdes entre mecs et envies de bagarre me semble juste, même si, je l'avoue, c'est un cadre où je ne me sens personnellement pas très à l'aise.
Dans ses récits, les femmes me semblent être des personnages externes, un peu extra-terrestres et bizarres, qui vont sur leurs propres orbes et dont les rencontres avec l'Homme sont souvent explosives.

Dans les deux volumes que j'ai lus (y en a-t-il d'autres ?), on suit deux enquêtes de Pierre Dragon et de ses collègues, qui, dans le premier, enquêtent sur des trafics internationaux (sweaters, limousines, chauffeurs), et dans le second sur la traite d'êtres humains.

Une fois de plus, le dessin de Peeters est remarquable, collant en finesse aux personnages, aux ambiances. On étouffe dans la camionnette de surveillance, on se cogne dans les petits bureaux, on visite toutes sortes de milieux, échanges de vêtements fabriqués dans des sweat shops dans des banlieues anonymes, fêtes au Crillon, poursuite sur les toits de Paris. Le tout dans une ambiance classique et pas désagréable de polar à la française. Les auteurs prétendent que presque tout est vrai, sinon les détails, et on veut bien les croire. Certaines anecdotes sont vraiment drôles ou tragiques, c'est selon.Ce que ça dit de notre monde, de sa criminalité compliquée, des liens qui s'étendent très vite au-delà des frontières, tout ça est à la fois fascinant et effrayant, et cohérent avec ce qu'a pu me raconter un ami qui gravite dans un milieu similaire.Je le redis, même si je n'ai pas tellement aimé ses histoires de SF, Frederik Peeters a un talent étonnant à rendre les échanges humains, regards, attitudes, sourires en coin, menaces... Tout sonne juste.

Avec un peu de recul, on sent Peeters très intéressé par les personnages d'hommes. Trentenaire looser dans Lupus, quarantenaire divorcé dans Aâma, et balaise super-viril-mais-sensible dans R.G. (divorcé aussi). Le traitement dans R.G. des ambiances de vestiaire, amitiés sincères mais pudiques, blagues un peu lourdes entre mecs et envies de bagarre me semble juste, même si, je l'avoue, c'est un cadre où je ne me sens personnellement pas très à l'aise.


Published on September 13, 2016 00:59
September 6, 2016
Aâma – Frederik Peeters
Suite de ma découverte du travail de Frédrik Peeters. Après
Lupus
, qui ne m'avait qu'à moitié convaincu, voici Aâma.
Sur une planète cyber (qui m'a évoqué celle de l'Incal) où tout le monde est implanté, Verloc ne porte rien et vit avec les avanies de son corps. Il a la quarantaine, une boutique d'antiquités, une ex-femme, une enfant autiste. Il va se retrouver embarqué, avec son frère qui a réussi, et l'étonnant garde du corps de celui-ci (un robot-singe nommé Churchill, vraiment balaise et vraiment cool) dans un voyage corporate-scientifique, à la recherche d'une substance nommée Aâma, susceptible d'avoir déclenché, sur une planète lointaine, une accélération folle de l'évolution.Il y a des trucs que Peeters réussit formidablement : la faune et la flore extraterrestre bizarre, les décors insolites et grandioses (tm), les personnages qui sonnent juste, les scènes d'actions flippantes et hallucinantes (celle qui ouvre le tome 3 est un modèle), et le fait de clôturer une série en quatre gros volumes. Et les robots singes.
Tout comme pour Lupus, je suis resté un peu au bord de la route. Je n'ai jamais vraiment cru à l'histoire, ni éprouvé de grande sympathie pour ce papa divorcé privé de sa fille en vadrouille dans l'espace. Les clés émotionnelles n'ont pas croché, j'ai admiré les décors et suivi le film avec plaisir, mais sans prévoir de le regarder de nouveau un jour.

Sur une planète cyber (qui m'a évoqué celle de l'Incal) où tout le monde est implanté, Verloc ne porte rien et vit avec les avanies de son corps. Il a la quarantaine, une boutique d'antiquités, une ex-femme, une enfant autiste. Il va se retrouver embarqué, avec son frère qui a réussi, et l'étonnant garde du corps de celui-ci (un robot-singe nommé Churchill, vraiment balaise et vraiment cool) dans un voyage corporate-scientifique, à la recherche d'une substance nommée Aâma, susceptible d'avoir déclenché, sur une planète lointaine, une accélération folle de l'évolution.Il y a des trucs que Peeters réussit formidablement : la faune et la flore extraterrestre bizarre, les décors insolites et grandioses (tm), les personnages qui sonnent juste, les scènes d'actions flippantes et hallucinantes (celle qui ouvre le tome 3 est un modèle), et le fait de clôturer une série en quatre gros volumes. Et les robots singes.

Tout comme pour Lupus, je suis resté un peu au bord de la route. Je n'ai jamais vraiment cru à l'histoire, ni éprouvé de grande sympathie pour ce papa divorcé privé de sa fille en vadrouille dans l'espace. Les clés émotionnelles n'ont pas croché, j'ai admiré les décors et suivi le film avec plaisir, mais sans prévoir de le regarder de nouveau un jour.

Published on September 06, 2016 21:26
L'homme qui mit fin à l'histoire - Ken Liu

Le sujet est casse-gueule, et politique, et très chargé. Je ne suis pas ressorti très à l'aise de ma lecture, non seulement à cause des horreurs évoquées, mais aussi parce que quelque chose ne me paraît pas très assuré dans la position de l'écrivain par rapport à son sujet.
La force de ce livre réside dans sa concision et dans son évocation de la découverte par un homme des gouffres de l'Histoire et de sa sidération face à eux. Que faire ? Que dire ? Et, quand on est écrivain, quel livre écrire ?

Published on September 06, 2016 05:51
August 23, 2016
Lupus – Frederik Peeters
Tony et Lupus sont en vadrouille dans un vaisseau qui va de planète en planète. Ils cherchent les plus belles parties de pêche, les meilleurs fournisseurs de drogues. Ils n'ont pas d'autre but dans la vie.… Jusqu'à ce qu'il rencontre Saana. Une fille, une fugueuse, avec ses grands yeux exaspérants et sa fausse innocence... et les choses vont mal tourner.
Je commence par ce que j'ai aimé dans cette série : la qualité des dessins, la finesse des relations entre les personnages, la capacité à rendre compréhensible ce qui ne se dit pas, les contradictions, les maladresses, les hésitations. Lupus, Saana, Tony et les autres intervenants de cette courte série sont attachants et justes. La narration lente ménage de grands espaces de respiration et de rêverie très agréables, et les planches sont souvent belles.
Mais, au delà de l'usage très décoratif de la science-fiction galactique (assez valerianesque, au fond, utilisée surtout pour son potentiel poétique), cette histoire de trentenaire en cavale qui cherche un but à sa vie et à comprendre ce qui l'a chassé loin de ses parents ne m'a pas vraiment intéressée.Ça pourrait faire un bon film français.
Je ne rejoins donc pas tellement l'avis de l'ami Benoît, que j'encourage à se procurer le Bifrost spécial bandes dessinées de science-fiction pour trouver quelques idées de lectures !

Je commence par ce que j'ai aimé dans cette série : la qualité des dessins, la finesse des relations entre les personnages, la capacité à rendre compréhensible ce qui ne se dit pas, les contradictions, les maladresses, les hésitations. Lupus, Saana, Tony et les autres intervenants de cette courte série sont attachants et justes. La narration lente ménage de grands espaces de respiration et de rêverie très agréables, et les planches sont souvent belles.

Je ne rejoins donc pas tellement l'avis de l'ami Benoît, que j'encourage à se procurer le Bifrost spécial bandes dessinées de science-fiction pour trouver quelques idées de lectures !

Published on August 23, 2016 12:39
August 18, 2016
The life aquatic with Steve Zissou – Wes Anderson
Ca doit être le point commun entre les livres de SF et les films de Wes Anderson : il faut commencer par expliquer l'univers avant de pouvoir raconter l'histoire.Ici, donc, un océanographe mondialement célèbre avec un bonnet rouge, inspiré du commandant Cousteau : Steve Zissou. Il navigue sur les océans de la planète avec son fidèle équipage (tous porteurs de bonnets rouges) sur son navire, le Belafonte, filme les merveilles du monde aquatique, publie un magazine (the life aquatic), entretient un club d'explorateurs nautiques auquel s'inscrivent les enfants et vit une rivalité scientifico-médiatico-amoureuse avec le commandant Hennessy et son "expédition Hennessy".
C'est un petit monde andersonnien, complètement barré (avec le cameraman hindou à turban, la script girl suédoise aux seins nus, les stagiaires sans nom...) dirigé par un mégalomane à la petite semaine qui ne cesse de se mettre en scène depuis des dizaines d'années. Mais voilà que, alors que Steve Zissou essaie de lancer sa prochaine campagne, à la poursuite du requin-jaguar, un jeune homme débarque qui dit être son fils...
Derrière le récit loufoque, enlevé et très drôle, derrière l'univers en boîte avec ses petits personnages vivant des aventures pleines de rebondissements, Life aquatic est un film mélancolique, qui parle de paternité, d'occasions manquées, de choix de vie foireux. Mais aussi de rêve et de poésie (toute la partie aquatique du film est complètement fantaisiste, réalisée en animation image par image, colorée et poétique), de gens créant des mondes pour en faire rêver d'autres...Enfin, le personnage de Steve Zissou ne se contente pas d'être un imbécile fat et mélancolique. Le récit, parfois cruel, lui donnera l'occasion, malgré l'âge et la pesanteur de la mémoire, d'évoluer et se transformer. Cette partie-là du film est celle qui m'a le plus ému, dans un film riche en séquences magnifiques. (mention spéciale à la B.O., pleine de chansons de David Bowie... adaptées.)
Twelve years old... That was my favorite age.


C'est un petit monde andersonnien, complètement barré (avec le cameraman hindou à turban, la script girl suédoise aux seins nus, les stagiaires sans nom...) dirigé par un mégalomane à la petite semaine qui ne cesse de se mettre en scène depuis des dizaines d'années. Mais voilà que, alors que Steve Zissou essaie de lancer sa prochaine campagne, à la poursuite du requin-jaguar, un jeune homme débarque qui dit être son fils...

Derrière le récit loufoque, enlevé et très drôle, derrière l'univers en boîte avec ses petits personnages vivant des aventures pleines de rebondissements, Life aquatic est un film mélancolique, qui parle de paternité, d'occasions manquées, de choix de vie foireux. Mais aussi de rêve et de poésie (toute la partie aquatique du film est complètement fantaisiste, réalisée en animation image par image, colorée et poétique), de gens créant des mondes pour en faire rêver d'autres...Enfin, le personnage de Steve Zissou ne se contente pas d'être un imbécile fat et mélancolique. Le récit, parfois cruel, lui donnera l'occasion, malgré l'âge et la pesanteur de la mémoire, d'évoluer et se transformer. Cette partie-là du film est celle qui m'a le plus ému, dans un film riche en séquences magnifiques. (mention spéciale à la B.O., pleine de chansons de David Bowie... adaptées.)


Twelve years old... That was my favorite age.

Published on August 18, 2016 22:08
August 13, 2016
Thing explainer – Randall Munroe
Le concept de ce livre est simple : de belles planches, façon blueprint, représentant le fonctionnement de divers systèmes : la station spatiale internationale, la subduction océanique, le soleil, un lave-vaisselle... le tout sans ordre particulier que le plaisir de parcourir ce qui nous entoure.
Le but de l'auteur ? Nous faire comprendre comment marchent tous ces systèmes. Ce qu'ils font.Et pour ça, afin de ne pas pouvoir se réfugier derrière de grands mots ou des concepts sophistiqués, Munroe a sélectionné les mille mots les plus courants de la langue anglaise, et s'est limité à ces mots-là pour écrire, faisant du livre un nid de périphrases et de trouvailles poétiques.Les planches sont pleines de détails, de petites plaisanteries cachées ici ou là, de notes rêveuses et drôles, dans l'esprit de xkcd. J'ai été ému d'apprendre pourquoi la vision de n'importe quel pont rend Munroe si heureux.
J'aurais aimé lire ce livre quand j'étais enfant, je l'ai dévoré aujourd'hui.


Le but de l'auteur ? Nous faire comprendre comment marchent tous ces systèmes. Ce qu'ils font.Et pour ça, afin de ne pas pouvoir se réfugier derrière de grands mots ou des concepts sophistiqués, Munroe a sélectionné les mille mots les plus courants de la langue anglaise, et s'est limité à ces mots-là pour écrire, faisant du livre un nid de périphrases et de trouvailles poétiques.Les planches sont pleines de détails, de petites plaisanteries cachées ici ou là, de notes rêveuses et drôles, dans l'esprit de xkcd. J'ai été ému d'apprendre pourquoi la vision de n'importe quel pont rend Munroe si heureux.

J'aurais aimé lire ce livre quand j'étais enfant, je l'ai dévoré aujourd'hui.


Published on August 13, 2016 09:00
August 10, 2016
Angry indian goddesses – Pan Nalin
Quand on a regardé la liste des films qui passait au cinéma le plus proche, on a dû penser quelque chose comme "tiens, un film indien, avec un message féministe et de jolies couleurs, ça nous changera." Les cinq premières minutes qui présentent les personnages sont pêchues et amusantes, le reste est une immense pub pour (ceux qui vendent des téléphones avec une pomme dessus) : image de clip publicitaire, défense de l'ouverture, liberté individuelle, vie à la coule, fête joyeuse, bons sentiments. Et ça se termine par une apologie dégueulasse de la vengeance. Le féminisme ne méritait pas ça.


Published on August 10, 2016 22:45
Groenland Manhattan - Chloé Cruchaudet
Arctique, début du 20ème siècle. L'explorateur américain Robert Peary ramène de son expédition, en plus d'une météorite, une petite famille inuite. La relation de l'explorateur avec les peuples du Nord est ambiguë: mélange d'admiration pour leurs techniques, d'une forme d'amitiés et de supériorité occidentale. Ces "sauvages" qu'il ramène sont aussi des trophées vivants de son expédition. Et quand ils tombent malades et que ne reste plus d'eux qu'un petit garçon, Minik, le grand explorateur réagit assez peu...
Ce livre délicat raconte la vie de l'enfant et imagine comment le jeune garçon perçoit l'Amérique des années 1900, les vêtements doux, les bains chauds, le parc d'attraction de Coney Island. A travers lui, on va suivre le point de vue inuit sur sur la conquête absurde du pôle, la découverte des pratiques "scientifiques" du museum, le choc du retour dans le monde glacé du Groenland.
Le livre est sobre et sans pathos, avec un dessin très créatif, capable de transmettre la délicatesse de la perception par un enfant de ces changements de mondes. Une belle réussite.
Ce livre délicat raconte la vie de l'enfant et imagine comment le jeune garçon perçoit l'Amérique des années 1900, les vêtements doux, les bains chauds, le parc d'attraction de Coney Island. A travers lui, on va suivre le point de vue inuit sur sur la conquête absurde du pôle, la découverte des pratiques "scientifiques" du museum, le choc du retour dans le monde glacé du Groenland.

Le livre est sobre et sans pathos, avec un dessin très créatif, capable de transmettre la délicatesse de la perception par un enfant de ces changements de mondes. Une belle réussite.


Published on August 10, 2016 01:06
August 9, 2016
Le cercle de Farthing - Jo Walton

Le cercle de Farthing a le goût des romans policiers anglais classiques, d'Agatha Christie à John Dickson Carr : meurtre compliqué, bonne société, policiers polis. C'est aussi confortable qu'une bonne tasse de thé accompagnée de scones, prise devant le feu un dimanche de novembre après avoir ramassé des feuilles mortes tout l'après-midi. Mais assez vite, et c'est là tout le talent du roman, le thé prend un goût amer. Le réalisme social n'est jamais très loin et surtout l'histoire se situe durant des années cinquante alternatives où le Royaume Uni n'a pas continué la guerre, ayant signé la paix avec l'Allemagne en 1941. L'Europe est toujours sous le joug nazi, les Juifs sont menacés même en Angleterre et justement la jeune Lucy a épousé un Juif... et une étoile jaune a été retrouvée sur le mort.
L'art de Jo Walton réside dans cette infusion dans une forme habituelle, élégante et confortable d'un trait de plus en plus fort de peur et d'amertume. Le Cercle de Farthing est une jolie réussite.
Aucune fanfare ni aucune grosse caisse ne peut transformer le God Save the King en bonne musique, mais les rares fois où on le joue dans sa totalité, ces deux vers seuls lui donnent un peu de vie.A bas leur politique,Déjouez leurs ruses de fripons !En fait, j'ai toujours supposé que si l'on saute habituellement ce second couplet, c'est parce que les tories soupçonnent vaguement que ces vers parlent d'eux.(George Orwell, cité en exergue)

Published on August 09, 2016 01:49