Laurent Kloetzer's Blog, page 43

January 17, 2017

Hospitalités - à Vidy

Parler de ce spectacle nécessite un peu de mise en contexte.


Voici comment le théâtre de Vidy le présente : Massimo Furlan a proposé à la municipalité de La Bastide-Clairence, bourgade du pays basque, d’annoncer l’ouverture d’un centre d’hébergement de migrants en vue de régler le problème des loyers trop élevés dans le village. Ce qui devait être une fiction est devenu réalité.
La lecture du livret nous renseigne un peu plus : un artiste (M. Furlan, donc), monte une "farce" annonçant l'ouverture d'un centre d'hébergement pour migrants dans ce joli village historique. Finalement, après 2015, une association se forme dans le village qui se bouge pour accueillir réellement des migrants sur place, et une famille syrienne est maintenant logée dans le village, l'association faisant de gros efforts pour son intégration. Nous comprenons que le spectacle va nous parler de cette histoire et que les personnes sur scène seront des habitants de la Bastide-Clairence.Cette histoire me touche naturellement beaucoup, parce qu'elle fait écho à des choses que nous avons vécues dans notre joli petit village historique au pied du jura suisse. Le fait de transformer une expérience politique collective en expérience théâtrale nous parle également: nous avions beaucoup aimé le travail fait par l'ARAVOH dans notre région.

Le spectacle, maintenant.Dans une première partie, les neuf intervenants, des habitants du village, disent chacun un texte qu'ils ont écrit, face public. Les textes parlent de leur histoire, leur travail, leurs racines, ce qui les lie au lieu. Ces gens sont très beaux, qui parlent courageusement d'eux-mêmes, de leurs histoires: la championne du monde du Fandango, comment on fait une carrière de maire, les migrations des Portugais dans les années 70, la vie dans une famille avec un enfant handicapé, l'éducation pour une fille de paysans basques très pauvres, la twingo rose du grand-père...C'est beau parce que les gens sont justes, parce qu'ils font apparaître par leurs récits le monde dans lequel ils vivent.Au bout d'un moment, les récits évoquent (brièvement) l'accueil de la famille syrienne. Les acteurs prennent alors un moment pour échanger avec le public (échange tout à fait artificiel, je n'ai jamais vu ce procédé fonctionner) avant de reprendre leurs discours alternés, moins pour parler d'eux-même que pour évoquer, de manière plus théorique, l'hospitalité et l'accueil de l'autre.
J'ai beaucoup de respect pour les habitants du village qui sont montés sur scène, ont fait un beau travail sur eux-mêmes et évoqué des choses fortes de leurs parcours et de leur vie. Je suis aussi touché par leur engagement local, dont on comprend bien qu'il est aussi un engagement ensemble. Les textes sont bien, l'action est juste, mais cela suffit-il à faire un spectacle ? Je suis ressorti tout chargé d'émotions. Parmi ces émotions, la colère et un vrai malaise.
De "l'intox" (moralement douteuse) sur l'accueil d'un centre de requérants dans le village et de la discussion sur les prix de l'immobilier, il n'a jamais été question. Du "comment" de l'accueil, des discussions sur les conditions matérielles de ce dernier, il n'a jamais été question. C'est dommage parce que c'est à ce moment que les questions politiques (au sens noble : comment agir ensemble, pour nous, pour eux, pour la communauté) auraient pu être évoquées. Je n'ai pas compris à quoi servait ce spectacle : à transmettre une expérience politique ? A évoquer l'accueil des migrants devant un public méfiant ? Mais le public était entièrement acquis, la réflexion politique était absente, rien ne fâchait, rien ne gênait. Le seul personnage en opposition était un "faux" personnage, incarné sur scène par le metteur en scène (ce simple artifice est d'ailleurs assez moche).D'un point de vue théâtral, l'ensemble était très pauvre. Quelques trucs faciles, une scénographie minimale. D'un point de vue écriture, si les textes ont été travaillés, ils ne construisaient rien ensemble et restaient tout du long juxtaposés.J'ai l'impression gênante d'avoir vu un spectacle construit en sélectionnant des habitants d'un lieu intéressant et en utilisant leur vie et leur expérience comme matière, pour gagner facilement l'adhésion du spectateur par un jeu d'empathie facile, le tout sans aucun questionnement moral. Comme si tout geste, parce qu'il est "artistique", n'avait plus besoin d'aucune justification.Quelles sont les conditions permettant la naissance d'un objet pareil, aussi mal fichu, aussi peu honnête ? Quelles politiques culturelles permettent cela ? Quels jeux sociaux d'auto-réconfort, d'aimables justifications ? On l'aura compris, les interrogations suscitées par ce spectacle sont très loin de l'hospitalité et de l'accueil des migrants.

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Published on January 17, 2017 11:37

January 10, 2017

La jeune fille sans mains – Sébastien Laudenbach

Nous avons eu l'occasion de découvrir ce film avec Rosa grâce à l'excellente programmation du studio des ursulines, rue du même métal à Paris. Juste un mot sur le lieu : le studio des ursulines est un petit cinéma spécialisé dans les films pour enfants, doté d'une seule salle avec balcon, petites colonnes, rideau rouge qui se lève avant le film. Un petit endroit magique qui sait ce que le mot cinéma veut dire.   Le film nous a été présenté par mademoiselle Chloé, qui a su éveiller notre curiosité et nous donner de bonnes pistes d'observation. Je n'y serais peut-être pas allé spontanément : j'ai une petite méfiance envers les films d'animation d'auteur du genre primés à Annecy, réalisés entièrement par un ancien prisonnier politique adinien qui a gravé les images au poinçon sur des plaques de métal rouillé. Et bien j'aurais eu bien tort. La jeune fille sans mains a été dessiné par l'auteur, avec de beaux traits d'encre assortis d'aplats de couleur. Vues en statique, les images rendent étrangement. Dans le film, elles sont magnifiques. Les traits incomplets, les figures juste évoquées, aidées la bande son stimulent le travail de l'imagination et font recréer tout un monde. Un monde de conte (inspiré des frères Grimm et adapté pour le théâtre par Olivier Py) : celui d'un meunier si pauvre qu'il vend au diable "ce qui se trouve derrière sa maison" en échange de la richesse. Il pensait vendre le pommier, il donne à la place sa propre fille, installée dans l'arbre qui est son terrain de jeux.

Le film respecte magnifiquement la cruauté du conte, qui verra un père couper les mains de sa fille, et celle-ci traverser mille épreuves difficiles qui pourraient toutes l'avilir mais qui ne font que la grandir. Les clefs symboliques sont tout le temps présentes, l'esprit poétique du spectateur est en alerte. La jeune fille sans mains est un récit d'initiation, une quête, une exploration du corps dans tous ses aspects (scènes sexuelles comprises, traitées avec grande délicatesse), qui ne fait aucune concession sur le récit. Un beau personnage de femme, une histoire puissante et une très grande réussite. J'ai adoré, Rosa aussi.
A voir à partir de neuf ans – l'histoire est dure mais jamais choquante.



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Published on January 10, 2017 06:46

Bilan 2016

Si j'en crois les statistiques de ce blog, il a été ouvert voici plus de douze ans, avec la vocation de me servir de mémoire externe pour les livres lus, les films et spectacles vus, mémoire externe, occasion de partage et exercice d'écriture. L'année 2016 aura été la plus prolifique en billets depuis la création du blog, même si on en retire les quelques rediffusions liées à l'actualité. 
Quelques découvertes de l'année écoulée :L'oeuvre complète de Florence MagninDu plaisir délicieux de la bonne société anglaise et de ses crimesUne série SF de qualité
Des alexandrins mordants
Le plaisir de jouer romainLes aventures pionnières d'une famille de hipsters à la campagneLe nouveau film préféré de Rosa & MargueriteUne bédé d'actualité sur une démocratie incertaineLes souvenirs d'un geste culturel inutile
Merci à tous de vos lectures, partages et commentaires !

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Published on January 10, 2017 04:58

December 15, 2016

And Then There Were None

Sur le conseil de David C., j'ai regardé la mini-série de la BBC And Then There Were None, adaptée des dix petits nègres d'Agatha Christie. C'est de la bonne came : bien écrite, bien jouée, intelligemment adaptée. Et pas trop longue (3 épisodes d'une heure).


La série est plastiquement très belle, avec une déco et des costumes années 30 magnifiques. J'avais lu le roman il y a longtemps, et si je me souvenais du principe (dix personnes ne se connaissant pas se retrouvent sur une île déserte et meurent les uns après les autres), j'en avais presque oublié le twist (qui est sans importance). 

La série est particulièrement sombre, les personnages sont hantés par des fantômes et par la culpabilité, ils marchent tous aux limites de la folie - on pourrait même trouver une explication fantastique au récit. La noirceur du propos m'a mis mal à l'aise, d'autant qu'on est à peu près certain du fait que même les personnages qu'on trouve sympathiques, à leur tour vont mourir.

Karim Debbache, dans le dernier Chroma, dit avec humour que cette histoire est un des premiers slashers. Il n'a pas tort.


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Published on December 15, 2016 00:42

December 14, 2016

L'inclinaison – Christopher Priest

Sandro Suskind est compositeur. Il a grandi dans une ville bombardée par l'ennemi et grandi dans un pays pressuré par une dictature militaire. Sur l'horizon, visible de ses fenêtres, des îles qui, selon la dictature, n'existent pas: les îles de l'Archipel du Rêve, sur lesquelles il finira par faire une étrange tournée, au détriment de...L'inclinaison (The gradual, en V.O.) est le troisième livre d'affilée que Christopher Priest consacre à l'Archipel. Il forme un élément d'une collection interne à l’œuvre de l'auteur, après le recueil de nouvelles éponyme et de l'excellente Fontaine Pétrifiante . Loin de l'expérimentation formelle des Insulaires (le récit en est simple et direct, à sa façon toute priestienne) et de l'angoisse étouffante de l'Adjacent , l'inclinaison développe cette émotion particulière de l'errance sur les navires et des découvertes de l'Archipel, qui faisait le charme tout étrange de la Fontaine pétrifiante. A travers les allers et retours du temps, la dérive douce du personnage principal a quelque chose de langoureux, comme une drogue un peu amère mais dont on ne saurait se passer. Les angoisses physiques et sexuelles des autres livres de Priest sont moins présentes, l'auteur nous fait partager une dérive agréable, placée sous le signe du temps et de la création.L'inclinaison est un livre d'évasion, évasion de l'auteur, évasion du lecteur. Je n'ai pas encore trouvé le chemin pour accéder aux îles sans nombre de l'Archipel du Rêve, espace réaliste où se mêlent le subjectif et l'objectif, le temps personnel et le temps perdu. Je ne sais pas où on achète des billets pour la traversée, mais je ne désespère pas de trouver.
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Published on December 14, 2016 12:48

December 13, 2016

All about Eve – Joseph L. Mankiewicz

Années 50, le milieu du théâtre new-yorkais. Margo Channing, une immense actrice, reçoit un soir une fan éperdue dont elle fait, par caprice, son assistante–secrétaire. Mais la première scène nous a montré que cette fan, Eve du titre, a reçu six mois après le plus grand prix que puisse recevoir un acteur... On va donc apprendre, par une série de flashbacks, comment on en est arrivé là.
Tiens, au fait, vous reconnaissez la femme en blanc qui joue un second rôle dans cette scène ? Elle n'avait pas encore percé, à l'époque...Je n'en dis pas tellement plus: ce film est un classique, et il est un classique parce qu'il est génial, comme seuls savaient être géniaux les films d'Hollywood de ce temps. Parce qu'il est magnifiquement joué, parce que les femmes y sont incroyablement belles, parce que c'est superbement dialogué et tellement bien écrit. Le récit est vif, souvent très drôle, souvent profond, souvent cruel. Les personnages sont comme nous tous, à la fois humains et monstrueux. Et  Mankiewicz filme les femmes comme personne.




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Published on December 13, 2016 13:09

December 10, 2016

Miss Poppins – au petit théâtre

Chaque année, en décembre, le petit théâtre de Lausanne sort sa super-production (à l'échelle du petit théâtre). Et cette année, ils s'attaquent à un mythe : un remake de Mary Poppins ! Il y a mille raisons de se planter en ressortant de son placard la nounou magique : le film de Disney et le sourire de Julie Andrews (et les chansons !) sont dans toutes les mémoires, notamment celles des enfants. Et personne n'arriverait à suivre sur ce terrain. La Divine Company, créatrice de ce spectacle, s'en sort superbement. L'histoire se passe de nos jours, le papa d'Emma élève tout seul sa fille après le décès de sa femme et la confie à une nounou pour s'occuper d'elle avant de rentrer du travail. Et Emma est insupportable, jusqu'à ce qu'arrive cette sorte de gouvernante anglaise qui...


Le récit respecte le code du récit de Mary Poppins : une gouvernante enchantée vient restaurer l'harmonie dans une famille aux relations tendues. La transposition moderne est très bien rendue : les relations du père et de la petite fille sonnent juste, que ce soit dans les dialogues ou dans la tension du père bien stressé par son travail de cadre sup' (architecte, en l'occurrence). Et le charme opère par la magie. Par un jeu magnifique de danses, changements de décors et prestidigitations, on assiste sur scène à toutes sortes d'opérations merveilleuses, depuis le sac où disparaît le parapluie, jusqu'à une forêt naissant depuis le sol de l'appartement, une plume volante qui se transforme en grande plume d'oie...

Les personnages secondaires sont très bien trouvés, depuis Anatole le vendeur de conversations, en passant par la belle-maman, Mrs Andrews, les ouvriers du chantier... Et l'excellent Tim: coiffeur, chauffeur, ouvrier, qui dégage une incroyable sympathie. De discrètes allusions sont faites au film, notamment à Bert, dont on devine qu'il est bien vieux maintenant. Si je devais faire un reproche au spectacle, c'est d'être un peu trop court: le contenu est tellement dense que les changements émotionnels des personnages paraissent parfois un peu forcés par le temps. On aurait aimé passer plus de temps avec eux, tant les acteurs les portent avec joie et énergie. Ce qui ne gâche rien, le spectacle est accompagné d'une musique originale et de chansons.Une superbe création.


Au petit théâtre de Lausanne jusqu'au 31 décembre. Les représentations sont complètes mais il est parfois possible de s'inscrire sur liste d'attente

photos © Philippe Pache
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Published on December 10, 2016 11:45

December 8, 2016

La petite maison dans la prairie T3 – Laura Ingalls Wilder

Je ne m'étendrai pas sur ce tome 3 de la petite maison dans la prairie, les souvenirs romancés de Laura Ingalls Wilder, car les qualités de ce volume sont les mêmes que celles des deux précédents : très bonne narration, sentiments finement décrits, impressions puissantes de la nature... On pourra se référer à mes deux billets précédents. Ici et .Dans cet épisode-ci, situé six ans après le précédent (quelques évènements tragiques se sont produits pendant l'ellipse), on retrouve les Ingalls, toujours solidaires, endettés et fauchés, qui abandonnent leur maison du Minnesota pour s'installer le long du chantier de la voie ferrée, dans l'espoir de s'installer sur des terres nouvelles ouvertes par le gouvernement aux colons. L'ambiance est carrément western, avec ville champignon, types douteux, voleurs de chevaux, copine délurée pour Laura et une ambiance du tonnerre. Je retiens des scènes marquantes : celle du jour de la paye, effrayante, celle de la ruée vers l'ouest, celle des filles sur les poneys noirs, et la très belle scène de l'adieu des loups au Lac d'Argent. Laura est une jeune fille farouche, très attachante, qui ne veut pas grandir trop vite. Les parents font des choix, bons ou mauvais, sont toujours aussi solidaires. On croise l'alcool, les hommes qui parlent mal, les bandits... Mais on fête aussi, comme dans chaque volume, un merveilleux Noël en famille.
[Laura] aimait sentir la grande prairie sauvage tout autour de la petite cabane. Son cœur battait fort et vite ; Laura pouvait encore entendre le grondement féroce de la foule et la voix glacée de Papa disant : "ne vous approchez pas trop près!". Et elle se souvint des hommes et des chevaux en sueur avançant obstinément à travers un nuage de poussière pour construire la voie ferrée dans une sorte de symphonie. Laura ne voulait plus retourner sur le bords du ruisseau Plum.
Marguerite dit : "c'est vraiment dommage ce qui arrive à Jack".
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Published on December 08, 2016 12:06

December 5, 2016

Il faudrait pour grandir oublier la frontière – Sébastien Juillard

Il faudrait pour grandir... est une novella de science-fiction publiée par les éditions Scylla. Novella veut dire un court roman, 111 111 signes exactement, une bonne lecture pour un court voyage en train, d'autant que dans ce cas vous aurez le voyage à l'intérieur du voyage. Le récit met en scène une poignée de personnages, Keren, soldat de l'armée israélienne, Jawad, ingénieur palestinien, Bassem, terroriste, et quelques autres, dans la bande de Gaza dans une trentaine d'années. Par le choix de son sujet, la densité du récit et de la caractérisation, Il faudrait pour grandir... est un petit bouquin très dense qui contient autant d'idées que certains gros romans. L'auteur a un vrai talent pour faire passer en quelques lignes des idées de SF étranges (comme la psycho-chirurgie) et des situations géopolitiques compliquées. C'est jouissif pour l'amateur de boissons fortes, ça pourra peut-être égarer ceux qui préfèrent plus d'explications. On est dans une SF à la Lucius Shepard (moins incarnée, peut-être), mêlant actualité géopolitique et sense of wonder. Une semaine après la lecture, je retiens de belles atmosphères de peur et d'attente, et Keren, beau personnage de femme, autour de laquelle gravite ce drôle de petit récit. Et, plus littérairement, une certaine idée de la manière dont nos positions politiques sont construites à partir de récits de fiction auxquels nous avons envie de croire, très belle idée.In fine, rappelons que comme tous les livres publiés par Scylla et Dystopia, ce petit bouquin est très beau – magnifique couverture, fabrication impeccable, un bonheur de bibliophile – et même pas cher (cliquez sur le lien, en haut de l'article). Et les amateurs de Yirminadingrad verront quelques ponts vers leur cité balnéaire préférée.


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Published on December 05, 2016 01:48

December 3, 2016

The Expanse

J'ai enfin fini de regarder les dix épisodes de The Expanse


The Expanse est une série de science-fiction, située au 23ème siècle, alors que l'Humanité a colonisé le système solaire. Les personnages en sont attachants (un équipage sans attaches, un détective privé de la ceinture d'astéroïde...) et plutôt bien écrits même si les acteurs, comme c'est souvent le cas dans ce genre de production, les jouent de manière assez plate (une manière de voir si un personnage a de l'importance, c'est de compter son nombre de visages. Une expression: personnage mineur. Deux expressions: personnage moyen. Trois expressions: personnage majeur). Le scénario est à base de guerre froide entre la Terre et Mars, de bio-machins et de nano-trucs, sur fond d'émancipation des Belters, cette population plus ou moins exploitée vivant sur les asteroïdes et alimentant les autres en ressources.

Je ne crache pas dans la soupe: l'histoire est bien menée, est intéressante, a du rythme. Le scénario a remarquablement peu de graisse – j'entends de scènes de remplissage. Les personnages sont bien écrits, ont des réactions intelligentes et on se prend d'affection pour eux. La dimension politico-sociale de l'histoire est bien traitée. Le groupe de héros est un vrai groupe de PJs, incarnés par des joueurs pas trop lourds (les rôlistes comprendra là que je fais un compliment aux scénaristes).
  La principale qualité de cette série, toutefois, n'est pas là: elle est dans la manière dont elle met en scène son univers, un des plus crédibles que j'ai vus depuis longtemps. La SF spatiale de The Expanse est à la fois impressionnante et un peu sale, les machines sont plus ou moins fiables, on imagine très bien la vie quotidienne à bord. Les conflits sociaux sont présents, les scandales sanitaires, les problèmes d'argent, les formes de société novatrices... (quelque part, cette série est l'héritière du premier "Alien", avec son vaisseau crado et ses prolos de l'espaaaace) 


Les petits objets de la vie de tous les jours (je pense aux "comm" qui servent de smartphones) sont très bien imaginés. Sur ce point, on se régale, on fait attention aux mille petits trucs "qui font vrai", comme les déformations physiques des Belters, les sièges anti-G, etc., etc.Et moi, quand on arrive à me faire croire à la fiction, et à la science-fiction, j'applaudis des deux mains en apesanteur.  (et puis tiens, je vais me faire offrir les bouquins)

Remember the Cant !
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Published on December 03, 2016 01:33