Laurent Kloetzer's Blog, page 42
February 16, 2017
Ma vie de courgette – Claude Barras
Du Ken Loach pour enfants. Voilà à quoi m'a fait penser ce film d'animation.
"Courgette" est le surnom d'un garçon qui perd sa maman dans des circonstances tragico-absurdes et qui se retrouve envoyé dans un foyer, où il sera bizuté avant de se faire des amis de ses compagnons d'infortune. Malgré les marionnettes et les couleurs acidulées, ma vie de Courgette joue dans un registre réaliste, que ce soit dans les dialogues crus, les interactions parfois cruelles des enfants entre eux, les réactions des adultes (ni des monstres, ni des anges, des gens désespérément faillibles), les situations sociales difficiles de chacun des héros. Le film est souvent drôle, parfois grinçant, parfois tendre. Je ne sais pas trop quoi en penser. Il fallait être culotté pour écrire et proposer ça pour des enfants. Les miennes ont détesté, peut-être ce monde est-il trop loin d'elles, il est sûr elles n'aimaient pas ces personnages aux grands yeux tristes. J'ai trouvé pour ma part le film un peu bancal, hésitant entre la description d'un milieu et d'un petit monde, le foyer (très réussi) et la nécessité de raconter une histoire, au risque de perdre les jeunes spectateurs. Et à la fin, Sophie Hunger chante Le vent l'emportera, ce qui résume bien toute l'ambivalence de mes sentiments envers le film.
Quoi que je pense de l'histoire, l'animation à base de marionnettes est formidable et le film est plastiquement très intéressant. Rien que pour cela, et pour ses choix culottés, il mérite une véritable attention.


Quoi que je pense de l'histoire, l'animation à base de marionnettes est formidable et le film est plastiquement très intéressant. Rien que pour cela, et pour ses choix culottés, il mérite une véritable attention.

Published on February 16, 2017 23:26
Un secret à la fenêtre – Norma Huidobro



Published on February 16, 2017 11:54
February 14, 2017
La nuit des chasseurs

La nuit des chasseurs est un jeu de rôle complet sous forme d’un petit livret, comprenant la mise en bouche évoquée ci-dessus, la description de la ville de Desolation, ses habitants et ses mystères, et une poignée d’intrigues majeures. De quoi jouer un gros scénario ou une petite campagne (notre choix). Les appendices contiennent des considérations bien vues sur le thème, l’époque et un système de jeu que nous n'avons pas utilisé. Le tout est d’un grand plaisir de lecture, dense et serré, et donne immédiatement envie de jouer: mes lecteurs habituels sauront que c’est là mon critère pour juger les bons bouquins de jeu de rôle.
Donc, nous avons joué la nuit des chasseurs, et ça marche, et c’est très bien. Vous avez envie de passer quelques heures dans une ambiance de western crépusculaire ? Ce petit livret vous donne tout ce qu’il vous faut pour vous faire votre Deadwood à vous : PNJs, coups tordus, histoire de faux semblants, de mensonges et de rédemption.

A partir de maintenant, cessez de lire si vous avez l’intention de jouer, car je vais raconter brièvement notre version de la campagne. Le compte-rendu, allusif, fait référence aux personnages du livret.
Donc, survivants à l’attaque de la diligence par Jefferson, se trouvent Lawrence le beau-parleur et l’Indien (métis français-sioux). Et dans la diligence, plaqué au sol pendant la fusillade et découvrant avec effarement les cadavres, monsieur Flemming, venu soigner sa tuberculose dans les paysages plus secs du Texas et prendre le poste d’instituteur de Desolation. Flemming aura l’intelligence d’accepter d’accréditer le récit de la fusillade: mais oui, ces deux hommes survivants sont bien les marshalls David Schneider et Thomas Planche.
Pendant que l’instituteur prend son poste, découvre les magouilles de la ville et la disparition de sa prédecesseuse, Ms Simpson (en vérité assassinée par le tueur de filles, après avoir été collée enceinte par le maire qui: 1- l’avait violée, 2- lui a collé la réputation d’être une fille facile), les deux marshalls se prennent au jeu et chassent les bandits. A vrai dire, Lawrence est plus intéressé par le trésor, ce que l’Indien lui accorde comme une lubie. Poursuites dans l’arrière pays, pistage jusqu’à Fort Reines, enquête sur le massacre d’une famille de Noirs, pièges, embuscades… L’Indien sympathise avec Guthrie, le propriétaire de la mine, et d’une certaine façon avec Garreth, son contremaître. Quand Guthrie est assassiné par Loomis, c’est naturellement vers l’Indien que se tournera la veuve pour ses missions les plus délicates. Une milice est formée en ville, mauvais souvenir de celle qui avait été formée pour lutter contre Dawson. L’espion de Loomis est trouvé, filé, chassé. Loomis abandonne Fort Reines et se perd au sud du Rio Grande. Certains se demandent pourquoi Loomis s’en prenait surtout aux fermes de la région (dont une bonne partie payent loyer à M. Price), plutôt qu’à la ville elle-même (dont l’essentiel des maisons est la propriété de M. Wilde). Le marshall Planche (l’Indien) est envoyé à Dallas (expédition mémorable, le bandit-cow boy n’ayant jamais mis les pieds dans une grande ville) pour ramener le fils Price, à la demande sa soeur, la troublante Esther, qui pense que même si la mine d’or ne rend plus, le rapport du Federal Bureau of Geology (un Mac Guffin de quelques courses-poursuites, vols et cambriolages) laisse penser que le minerai de Bauxite, auquel l’or est mêlé, pourrait avoir une valeur encore plus grande. Au retour de Dallas, Planche manque de succomber dans une embuscade tendue par… Loomis ? Non. Par Trevor, l’homme de main de Wilde ! Avec l’aide de la jeune McLane (sa meilleure élève), l’instituteur découvre la source des gémissements mystérieux qu’on entend venir du nord, quand le vent souffle. On écoute le sol avec un appareil conçu à cet effet, et on découvre une mystérieuse cache souterraine où gémit dans les ténèbres et la puanteur un homme devenu fou. « Garreth… je vais te tuer… » Les marshalls enquêtent aussi sur les filles disparues, avec l’aide de Ms Clara Stanford, qui tombe amoureuse de l’Indien, malgré sa crasse et son manque de vocabulaire. On commence par découvrir ces meurtres dont le sheriff et le maire avaient caché l’existence, on parle signes mystérieux, apocalypse, etc. L’Indien fait semblant de violer Ms Stanford, pour que celle-ci, devenue enceinte, puisse servir de cible au tueur (malheureusement, celui-ci s’en prendra d’abord à Dixie, la prostituée préférée du Reverend Richardson). Les choses s’accélèrent, autour de la mine Guthrie, autour du trésor : les marshalls remontent peu à peu les pistes, le coffre à la banque, le ranch de l’Allemand, la carte très approximative, les bijoux dans les tunnels inondés de la mine (que Martha voudrait explorer à l’aide d’un système d’exploration sous-marine: pompe, tuyau, casque en bocal à poissons rouges - Flemming désapprouve). Ils se retrouvent confrontés à Polland, le détective de la Pinkerton, qui les espionne, les précède parfois, manque de tuer Lawrence... Un marshall arrive en ville, qui prétend être un vieux copain de Planche et Schneider... Une nuit de cauchemar, le tueur de filles manque d’éventrer Ms Stanford, se fait descendre. Et alors que les marshalls battent la campagne pour trouver pourquoi le trésor ne se trouve plus à l’endroit indiqué par la carte (réponse: il a été trouvé, déterré et gardé précieusement par Bear, l’ancien complice de Dawson), Loomis revient en ville accompagné d’une troupe de mercenaires mexicains et met en scène dans le saloon le procès dément du cadavre de Jefferson et du marshall Caine, un mort et un fou. Il y aura des enfants pris en otages, des innocents menacés, parfois tués, beaucoup de coups de feu et un duel pas propre derrière le bar entre Loomis et l’Indien. L’histoire se termine avec Flemming, pauvre et intègre, faisant venir sa fiancé à Desolation, et les marshalls, qui ont trouvé le trésor et assassiné Bear, se séparant et disparaissant vers d’autres horizons, Lawrence vers la Californie, l’Indien vers le Minnesota, où il emmène Ms Stanford qui deviendra sa femme.

Ce fut donc une bien chouette campagne ! Nous n’avions jamais expérimenté le western en jeu de rôle, c’est un cadre qui marche très bien. Le lecteur attentif notera que nous avons modifié des éléments de l’intrigue. Loomis est devenu une ombre mystérieuse dont on voit la silhouette partout, en plus d’être un excellent tireur. Il y a eu toute une intrigue autour de la famille Guthrie, de la mine et de son avenir (et de la promesse de voir un jour - ou pas - Desolation devenir une ville minière enrichie par l’aluminium). Le trésor a été caché un peu ailleurs et j’ai introduit un paquet de fausses pistes et de rumeurs. Pour ce qui est de l’intrigue, le jeu qui consiste à reconstituer la dernière nuit du marshall Caine est très amusant, permettant de nombreuses rencontres entre PJs et PNJs : Flemming ayant la tête qui tourne au-dessus du décolleté de la veuve de Cletus, l’Indien sympathisant avec Quincy le croque-mort, ses enfants aux grands yeux et sa soeur folle, Lawrence jouant aux cartes avec James Jr et s’infiltrant ainsi dans la banque... Bref, c’était bien. Si vous connaissez d’autres jeux, d’autres livrets du même genre, je suis preneur !

Published on February 14, 2017 22:10
February 13, 2017
Vendredi – Robert Heinlein

Cette notule très intéressante parue dans Bifrost situe le roman dans l'oeuvre d'Heinlein. J'en recommande chaudement la lecture !

Published on February 13, 2017 23:59
February 7, 2017
Le grand sommeil – Raymond Chandler


Published on February 07, 2017 23:22
February 1, 2017
Les faux monnayeurs – André Gide


Published on February 01, 2017 00:25
January 30, 2017
Trop de témoins pour Lord Peter – Dorothy Sayers


Published on January 30, 2017 23:41
January 20, 2017
Cartouche – Philippe de Broca
Nous avons donc voulu montrer un film de cape et d'épées à Rosa et à Marguerite. N'étant pas connaisseurs du genre, nous avons choisi celui-ci notamment parce qu'il y avait Claudia Cardinale.Donc, Cartouche. Un bandit au grand cœur défie les puissants. Il y a Belmondo, le jarret énergique, charmeur quand il faut, tragique à la fin.
Il y a Claudia Cardinale, qui ne joue pas très bien mais qui est tellement belle... Il y a de l'humour frenchy des années 60, des combats réglés par Claude Carliez (déjà !) et plutôt cools comparés à ceux de notre époque chorégraphiée par des maîtres du kung-fu.
Il y a des décors historiques français classieux, des bagarres façon Astérix (pif, paf, pouf, bong !), des méchants très méchants, des filles plutôt potiches, une scène finale très très belle. Et surtout, dans un second rôle quasi inutile mais qui crève l'écran, il y Jean Rochefort (soulignez trois fois), mordious, Jean Rochefort !
Conclusion ? Cartouche a plutôt bien vieilli, on peut le regarder avec des enfants (malgré les scènes de tortures), c'est rigolo, tragique, français (prononcer le mot avec voix d'André Malraux) et surtout, ça a du panache !

Il y a Claudia Cardinale, qui ne joue pas très bien mais qui est tellement belle... Il y a de l'humour frenchy des années 60, des combats réglés par Claude Carliez (déjà !) et plutôt cools comparés à ceux de notre époque chorégraphiée par des maîtres du kung-fu.


Il y a des décors historiques français classieux, des bagarres façon Astérix (pif, paf, pouf, bong !), des méchants très méchants, des filles plutôt potiches, une scène finale très très belle. Et surtout, dans un second rôle quasi inutile mais qui crève l'écran, il y Jean Rochefort (soulignez trois fois), mordious, Jean Rochefort !

Conclusion ? Cartouche a plutôt bien vieilli, on peut le regarder avec des enfants (malgré les scènes de tortures), c'est rigolo, tragique, français (prononcer le mot avec voix d'André Malraux) et surtout, ça a du panache !

Published on January 20, 2017 23:56
January 19, 2017
De cape et de crocs T11 et T12 — Ayroles et Masbou
Ça y est, c'est fini, définitivement fini. Le tome 12, si ce n'est toi, clôt la préquelle racontant comment le lapin Eusèbe s'est retrouve sur cette galère.
On se reportera à ce billet pour une présentation générale de la série. On découvre donc dans ce diptyque les aventures du lapin Eusèbe, évoquées par allusion tout au long de la série : son entrée dans les gardes du Cardinal (si, si !), son jumeau maléfique, ses différents embastillements...
Alors que le récit de la série principale est une fantaisie regardant beaucoup le théâtre baroque et les œuvres de Cyrano de Bergerac, le cycle d'Eusèbe (comme le nomment les docteurs de la Sorbonne) lorgne vers le Candide de Voltaire meets les Trois Mousquetaires. L'intrigue est complexe, politique, touffue, mêlant cardinal mourant, tentatives de coup d’État, tueur à gages triste et cours des miracles. C'est très dense et c'est génial. Grâce aux gags (j'ai hurlé de rire à la référence croisée Bossuet-Chantal Goya), à la subtilité narrative avec laquelle ce sous-cycle répond au cycle principal (la présence-absence de Lope et Armand, par exemple), à la morale profonde de l'histoire, qui voit le bien et la bonté triompher, malgré la cruauté du monde. De cape et de crocs est une grande œuvre de littérature française et un immense bonheur de lecteur. Ses derniers mots m'ont fait pleurer. "Peut être arrivons-nous enfin à bon port ?"




Published on January 19, 2017 23:23
January 18, 2017
The Hanging Tree – Delmer Daves

Après ma lecture éblouie de la novella la colline des potences, j'appréhendais un peu de voir le film qui en a été tiré en 1959, avec Gary Cooper et Maria Schell. J'avais tort, c'est formidable !

Le film est très proche du récit de Dorothy Johnson. Les paysages sont magnifiques, la reconstitution du camp de chercheurs d'or très crédible. Gary Cooper incarne un très beau docteur Frail, plus costaud que celui que j'imaginais dans le récit, mais très réussi psychologiquement, aussi bien dans la bonté que dans la cruauté. Les seconds rôles sont splendides (Karl Malden fait un très beau Frenchy Plante) et le personnage de la femme perdue est très fort. Les scènes finales avec les flammes et l'étrange danse païenne de destruction sont mémorables.


Bref, vous avez envie de voir un western "classique", très bien écrit, bien joué, bien filmé, avec de beaux paysages et des acteurs qui envoient ? Ce Hanging tree vous rendra heureux.(et je n'avais jamais vu de films avec Gary Cooper !)



Published on January 18, 2017 02:57