Laurent Kloetzer's Blog, page 29

January 12, 2019

Le miroir se brisa – Guy Hamilton

Cinéma avec les enfants, on continue notre exploration du cinéma des années 70-80 adapté d’Agatha Christie, avec une enquête de Miss Marple. Années 50, joli manoir. Une star vieillissante (jouée par Elizabeth Taylor, star vieillissante elle aussi) participe au tournage dans la région d’un film en costume. Lors d’une réception, la secrétaire de la paroisse meurt empoisonnée. Etait-ce bien elle qui était visée ? Dans cette troupe de tournage où beaucoup se détestent, qui veut la peau de qui ? Miss Marple s’est fait une entorse, elle enquête à distance depuis son fauteuil (quand elle ne spoile pas les protections du cinéma paroissial en devinant les assassins par avance).
Le miroir se brisa n’est pas un grand film: la réalisation est très planplan. Mais décors et costumes sont bien, le récit est rigolo, l’intrigue est tordue à souhait, les acteurs cabotinent, on reconnaît plein de stars dans des petits et des grands rôles. Contrairement à mort sur le Nil, celui-ci n’est pas trop violent. Les filles l’ont bien aimé et nous aussi.
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Published on January 12, 2019 05:44

January 10, 2019

L'abominable homme de Säffle – Maj Sjöwall et Per Walhöo

Je n’arrive pas à me rappeler si j’avais oui ou non déjà lu ce roman de Sjöwall et Walhöo (que je prononce, sans doute à tort, Cheval et Valou, mais ça me permet de me rappeler leurs noms): j’ai découvert ce couple d’auteurs il y a une vingtaine d’années, alors que je ne connaissais rien de la Suède et pas grand chose à l’ironie et à la critique sociale. J’ai un peu appris depuis et j’apprécie d’autant plus.
Suède, début des années 70. Alors qu’il s’apprêtait à aller se coucher, le commissaire Martin Beck (notre héros, un fonctionnaire de police consciencieux, assez doué et introspectif, dénué de fantaisie – qui a dit Suédois ?) est appelé pour constater le meurtre sanglant d’un collègue, le commissaire Nyman, massacré à la baïonnette dans sa chambre d’hôpital. Accompagné de son collègue Röm, qui a lui aussi déjà une journée dans les pattes, ils vont tenter de retrouver, vite, le tueur avant que celui-ci ne recommence.
L’abominable… est un excellent roman: roman d’enquête, thriller, avec des enquêteurs aux yeux rougis (et non, ils n’iront pas dormir avant la fin de l’histoire) shootés au café et même des scènes d’actions épatantes. Mais des scènes d’action épatantes écrites par des Suédois caustiques avec héroïsme stupide, incompétence épaisse, héros soucieux et tirs qui partent souvent à côté. Ca rajoute une bonne couche de réalisme et de suspense.
Tout le roman est aussi un parcours de la société suédoise, vue à travers sa police, force d’état pas antipathique mais prise entre son passé militaire récent, ses tentations un peu fascistes, ses côtés progressistes, ses politiciens nuls, ses policiers dévoués. Les portraits des personnages sont savoureux et touchants. On croise aussi un paquet de paumés de la société suédoise, de gens dépassés, et quelque connards ambitieux ou méchants. C’est souvent très très drôle, mais le discours politique et caustique du récit ne perd jamais de vue la narration principale, menée tambour battant jusqu’à sa fin terrible.
Une note contemporaine: à un moment, excellent, Einar Röm parcourt un recueil de plaintes déposées contre des policiers, comme une série de petites histoires d'injustices montrant combien la police peut être une véritable nuisance – c’est un moment fort du récit. Et on se rend compte que, même méchante, la police suédoise de l’époque l’est sans doute bien moins que la police française de maintenant.
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Published on January 10, 2019 05:37

January 9, 2019

La belle et la bête – Au petit théâtre

Le spectacle de Noël du petit théâtre de Lausanne est leur « grosse production » : généralement la pièce la plus ambitieuse de la saison, souvent une création locale. Nous avons vu lors des saisons précédentes nombre d’excellents spectacles présentés ainsi (l’arche part à huit heures, le dératiseur de Hamelin…)



Cette année, on nous propose une adaptation par Michel Voïta du conte classique de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont. Disons-le tout de suite, c’est du bon boulot: scénographie inventive, acteurs doués (mention spéciale au couple de soeurs méchantes qui forment un très beau duo de comédie grinçante). C’est rare, et digne d’être noté, l’écriture de la pièce est aussi très réussie, gardant par moments des accents du XVIIIème siècle et n’hésitant pas à user d’un beau langage. La narration est énergique et dynamique, avec ellipses bien posées (certains scènes, cliché et attendues, ne sont tout simplement pas montrées et c’est très bien) et de beaux moments: les tabourets à un pied, le Split-screen sur scène du père entrant dans le palais, les changements de robes de Belle. On passe un bon moment de théâtre, adultes comme enfants, le spectacle est très recommandable. Sa saison est terminée au Petit théâtre, mais si jamais il tourne et est remonté ailleurs, je vous encourage à aller le voir.  
Une remarque plus critique maintenant: Michel Voïta, dans son adaptation, garde l’essence du conte (c’est bien) et en dit quelque chose (c’est bien aussi) : ma théorie est qu’il fait de ce récit le portrait psychologique d’une jeune femme, tous les personnages (bête et méchantes soeurs) représentant des éléments d’un discours intérieur d’Isabelle – Belle. Et tout ça est une bonne idée qui marche plutôt bien, surtout dans la première partie. Le personnage de Belle, toutefois, n’évolue pas de manière très heureuse: de vertueuse, positive, fantaisiste et simple au début (quand elle se balade avec ses bottes de fermière achetées à la Landi (référence suisse)), elle devient pleurnicharde dans la deuxième partie (pourquoi pas, ça reste dans le ton larmoyant du 18ème siècle) mais surtout très garce dans la fin où elle exerce sa vengeance. Dommage que cette vertu fantaisiste, incarnée par la relation (inventée pour la pièce) avec la fée-marraine ne se maintienne pas jusqu’à la fin. Je peux comprendre d’un point de vue psychologique ce revirement « garce » de Belle, mais on perd alors la lecture 1er degré du conte, et les enfants ne s’y sont pas trompés. Elles n’ont pas aimé ce que Belle devenait à la fin.
Que ces limites, qui sont plutôt une réflexion sur la narration, ne vous éloignent pas d’un spectacle bien fait et intéressant !  
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Published on January 09, 2019 05:29

January 7, 2019

Mon drôle de petit frère – Elizabeth Laird

Une lecture pour enfants, commencée un peu par hasard, parce que Rosa avait aimé un autre roman de la même autrice. Le quatrième de couverture nous dit qu’il va être question d’une jeune fille dont le petit frère est lourdement handicapé. On pourrait s’attendre là à un récit plein de bons sentiments et de moraline, mais en fait non.  Le vrai titre du roman est Red sky in the morning, la couleur rouge du ciel le matin du jour où la mère d’Anna, une jeune fille de douze ans, accouché prématurément, à la maison, d’un petit garçon très handicapé. La naissance de Benedict, dit Ben, forme la scène d’ouverture à la fois drôle et violente. Red sky in the morning est une chronique adolescente, qui voit grandir Anna, exposée au regard des autres, à la vie, à la différence, à la mort. Le récit est tout le temps passionnant, jamais lourd, jamais misérable, racontant les souffrances de la famille, le corps changeant de la jeune fille, les pressions sociales, les amitiés, les imbécillités. A travers le petit frère handicapé, c’est surtout un roman réaliste qui parle de la vie comme elle vient et comme elle va (parfois mal). Ecriture ramassée, efficace, rendu très fin des relations sociales, souffrances et réparations, n’éludant pas mais n’étant jamais choquant, il s’agit d’un très bon roman, adapté pour des enfants à partir de dix ans, capables d’encaisser des scènes parfois dures. Je l’ai lu à voix haute aux enfants et ai dû parfois expliciter quelques allusions: à la vie professionnelle et sentimentale (des parents), aux classes sociales, à la sexualité.
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Published on January 07, 2019 05:24

January 6, 2019

Quelques livres sur l'écriture

Dans le cadre de l'atelier que j'ai animé pour le CSF du SU-ITE (sexy, non ?), je me suis demandé comment apprendre à écrire des histoires de science-fiction. Des conseils pour écrire des histoires, il en existe plein. Les conseils pour écrire de la SF sont bien plus rares. Mes demandes posées sur les réseaux sociaux m'ont remonté plein de ressources, mais la part de ces dernières consacrées à la SF est très réduite. Pour ceux que le résultat intéresse, voici le résultat de ma pêche.
Sur le blog Bifrost, les articles de Claude Ecken. (merci Claude !)http://blog.belial.fr/post/2009/08/11/L-ecriture-de-la-science-fiction-1http://blog.belial.fr/post/2009/08/18/L-ecriture-de-la-science-fiction-2http://blog.belial.fr/post/2009/08/25/L-ecriture-de-la-science-fiction-3
Ces articles sont clairs, amusants et offrent de nombreux conseils "de base".
On m'a aussi conseillé le livre d'Orson Scott Card, How to write fantasy and science-fiction (traduit à l'époque par Bragelonne, mais introuvable hors occase).
C'est un How to book à l'américaine, très clair, comprenant nombre de bonnes idées: par exemple, connaissez les principaux tropes de la SF: si vous écrivez une histoire de voyage dans le temps/supgraluminique/apocalypse..., elle va être comparée par vos lecteurs aux autres histoires du même type qu'ils connaissent.

Enfin, ma meilleure lecture sur le sujet (moins technique et plus philosophique) est le remarquable recueil d'essais d'Ursula Le Guin, le langage de la nuit, qu'on trouve en plus en français aux forges de Vulcain. Mme Le Guin a une expression d'une très grande clarté et des idées très fortes. Elle se demande notamment pourquoi écrire de la littérature d'imaginaire.  







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Published on January 06, 2019 07:25

January 5, 2019

Forrest Gump – Robert Zemeckis

Film vu lors d’une soirée cinéma avec les enfants. Je ne connaissais pas Forrest Gump, sauf certaines de ses répliques emblématiques (la vie c’est comme une boîte de chocolats… Cours Forrest, cours, etc.) et j’ai de la sympathie pour Zemeckis, sous-Spielberg auteur d’au moins une série de films que nous avons aimés.    
Nous avons regardé le film avec plaisir, qui nous a permis d’expliquer aux enfants des éléments de l’histoire et de la culture américaine: la lutte pour les droits civiques, la guerre du Vietnam, la contre-culture, etc. Pas mal de bonnes scènes (j’aime particulièrement celle où Forrest se libère de ses attelles, et les images du lieutenant Dan perché en haut du mât du crevettier. 
Si le spectacle a été plaisant, et la romance agréable à suivre (même si son côté très fabriqué nous a frappés), j’ai été choqué par le sexisme du récit. Celui-ci étant une allégorie, les personnages doivent être aussi compris comme tels: opposition entre une Amérique pleine de bon sens, simple, parfois violente (pour la bonne cause), masculine, et une Amérique de contre-culture, féminine, droguée, perdue, qui ne trouve sa rédemption que dans la maternité. Le personnage de Robin Wright est intéressant (et j’aime cette actrice !) mais le rôle qu’on lui fait endosser est bien pénible.  Un article intéressant qui met le film dans son contexte, le début des années 90.
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Published on January 05, 2019 05:22

January 3, 2019

Meurtre au comité Central – Manuel Vásquez Montalbán

Etant amateur des romans de Camilleri mettant en scène le commissaire Montalbano, il fallait bien que j’en vienne à lire son modèle, Montalbán, auteur des aventures de Pepe Carvalho, détective barcelonais. Dans ce récit, situé dans les années 80 de la toute jeune démocratie espagnole, le détective n’est engagé par personne d’autre que le Parti communiste espagnol pour enquêter sur l’assassinat de son secrétaire général. Dépaysé de Barcelone à Madrid, le détective désabusé amateur de répliques cryptiques, de jolies femmes et de bonne bouffe se retrouve à mener une enquête bizarre, entre considérations politiques, souvenirs personnels de la résistance au franquisme, coups sur le crâne à la Burma et tentatives de trouver un restaurant correct.
Je n’ai pas du tout accroché sur ce roman qui m’a, je pense, complètement échappé. Il est plein de références à la culture culinaire et politique espagnole, que je n’ai pas. Les situations sont souvent intéressantes, ces anciens résistants communistes ont quelque chose de juste et touchant, Carvalho est plutôt antipathique mais pas désagréable à suivre, mais j’ai eu l’impression que le roman me parlait depuis un autre monde, tout proche, sans m’en donner les clefs. J’ai vu que Montalbán était considéré par des gens intelligents comme un grand auteur, c’est sans doute le cas, je serai peut-être capable de le comprendre quand je connaîtrai mieux l’Espagne.
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Published on January 03, 2019 05:17

December 30, 2018

Bouclage 2018 - films

Films vus mais qui n'ont pas mérité une notice
Le réveil de la force –  J.J. AbramsMalgré quelques belles images et bons personnages (j'ai bien aimé les vieux Solo et Léia ainsi que la tenancière de rade galactique à grosses lunettes), j'ai trouvé l'ensemble assez pénible. Bien en dessous de Rogue One.
Les aventuriers de l'arche perdue – Steven SpielbergRevu dans la foulée de la dernière croisade. Les enfants ont adoré, les parents ont eu du plaisir aussi. Etonnant comme le personnage de Marion, plutôt bien écrit et badass au début, devient une nénette en détresse dans la deuxième partie.
L'école buissonière – Nicolas VanierRosa a beaucoup aimé cette histoire d'initiation dans les beaux paysages de Sologne. Comédie dramatique avec subvention du département du Loiret. Vanier film bien les animaux et ça se termine bien.
Le papillon – Philippe MuylNoté pour mémoire: un vieil homme et une gamine dans de beaux paysages naturels, voilà tout ce qu'il y a de bon dans le film. Pour le reste, un son naturaliste "film français", une photo assez moche, réalisation plan-plan façon téléfilm et surtout un récit très mal écrit. Scénario mince, dialogues un peu faux, rien qui sorte trop des clous.

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Published on December 30, 2018 23:20

Le tour de la bouée – Andrea Camilleri

Dans la suite de notre retour à Camilleri, le tour de la bouée est une enquête du commissaire Montalbano mettant en scène notre commissaire vieillissant confronté à une histoire sordide de débarquement de migrants dans sa Sicile natale. Le livre date de bien avant la grande crise de 2015 (on hésite à l'appeler ainsi, ça pourrait faire croire qu'elle est terminée – il n'en est bien sûr rien) et tout est déjà en place, notamment la situation tragique de l'Italie, un des pays européens que les autres laissent seuls pour se débrouiller face à ces tragédies. Malgré ce fond tragique et plusieurs passages poignants, le roman parvient à être drôle et contient son lot de bonnes scènes.Je note deux choses intéressantes. Déjà, le sens du rythme de Camilleri: une vingtaine de chapitres d'une dizaine de pages chacun et zou, c'est fini, sans ennui ni temps mort, mais pas sans profondeur. Deuxièmement, le roman s'ouvre par la décision de Montalbano de démissionner suite aux évènements du G8 à Gênes (mais si, souvenez-vous, mes lecteurs. Aucun de vous n'est trop jeune pour avoir oublié ça). Le personnage se fait cri du coeur de l'auteur.
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Published on December 30, 2018 00:57

Le coup du cavalier – Andrea Camilleri

Je n'avais pas lu Camilleri depuis plusieurs années (12, si j'en crois ce blog, qui devient un support pour ma mémoire défaillante). Pour ceux qui ne connaissent pas: Andrea Camilleri est un ancien metteur en scène de théâtre et de télévision, venu vers ses cinquante ans à la littérature, essentiellement policière, presque toujours centrée sur la petite ville sicilienne (imaginaire, enfin presque) de Vigàta. Son œuvre suit principalement deux axes: les enquêtes du commissaire Montalbano, contemporaines, avec des meurtres bizarres, des plats siciliens typiques et une vision politique plutôt à gauche. L'autre axe sont des romans sociaux ironiques, plus littéraires, situés dans la Sicile de la fin du XIXème siècle.Là où Camilleri est bien plus qu'un auteur de polars, ou un auteur régional, c'est par son travail sur la langue, mélange d'italien et de sicilien de sa région natale, travail étonnamment rendu par un jeu sur le français par son traducteur fétiche, Serge Quadruppani. Une langue riche et drôle et un peu absurde, qui ne ressemble à nulle autre, et qui donne toute la force de son travail.Le coup du cavalier est de la veine roman XIXème: un fonctionnaire zélé, né en Sicile mais grandi à Gênes, est nommé pour inspecter les moulins de la région de Vigàta. Ses deux prédécesseurs ont eu quelques malheurs (accident de pèche en mer et chute de cheval. Oh zut). On sera plus du côté de la comédie de mœurs (très acide) que du thriller: on rit beaucoup, dans le coup du cavalier, et c'est très cruel.Les romans de Camilleri sont courts et rythmés et celui-ci, plus que les autres, repose quasiment entièrement sur la langue: mélange du sicilien local, bien sûr, de l'italien, langue de l'administration et du pouvoir, et du génois d'enfance dans lequel pense le héros. La langue est la source de ses ennuis, elle sera la clef de la libération. C'est excellent, étonnant, délicieux. 
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Published on December 30, 2018 00:04