Sylvain Johnson's Blog, page 29

February 3, 2014

Sylvain Johnson en interview sur le blog “Parlons Livres”

Originally posted on L'Imaginarius:


Retrouvez une très intéressante interview du FDR Sylvain Johnson, à lire sur le blog littéraire ?Parlons Livres?.






http://parlons-livres.blogspot.fr/2014/02/interview-dauteur-sylvain-johnson.html





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Published on February 03, 2014 10:24

Sylvain Johnson en interview sur le blog "Parlons Livres"

Reblogged from L'Imaginarius:


Retrouvez une très intéressante interview du FDR Sylvain Johnson, à lire sur le blog littéraire "Parlons Livres".


http://parlons-livres.blogspot.fr/2014/02/interview-dauteur-sylvain-johnson.html


Suite… 2 autres mots

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Published on February 03, 2014 10:24

January 17, 2014

Le manuscrit refusé – La suite qui déchire !

Éditeur


P.S : Aucun éditeur n’a été blessé durant l’écriture de ce texte !


L’éditeur tomba au sol pour la première fois, se blessant les genoux sur l’asphalte humide, s’éraflant les paumes déjà ensanglantées. Plusieurs blessures l’incommodaient et le sang qui coulait dans ses yeux le brûlait et l’aveuglait partiellement. Il leva le regard vers le ciel obscur, vers le firmament étoilé de cette nuit fraîche et d’une voix éraillée, murmura :


« Pardonne-leur, Père, car ils ne savent pas ce qu’ils font »


Une masse lourde se déposa sur son dos. Un genou compressa sa nuque en l’immobilisant face contre le sol. Il pouvait sentir l’odeur d’alcool venant de son agresseur qui l’écrasait, entendre les rires des autres qui l’entouraient et il ignora les insultes, les cris qui le condamnaient.


L’écrivain au-dessus de lui laissa tomber un document, qui entreprit un long vol plané pour se déposer quelques centimètres devant ses yeux embués par les larmes. L’homme bourru qui le chevauchait lui frappa l’arrière de la tête.


-  Tu trouves que mon texte n’a pas assez de profondeur psychologique?


Alexandre laissa son regard dériver sur le document, une page dactylographiée au contenu impossible à lire, mais dont le texte était strié de lignes rouges. Il avait peut-être effectivement lu ce manuscrit, l’avait très possiblement refusé. Il en recevait tellement.


Un des autres lança une bouteille de bière vide à proximité et elle éclata en déversant sur lui une pluie de morceaux pointus, répandant une puissante odeur de bière dans l’air. Quelques rires exagérés par l’ivresse s’élevèrent dans son dos. Il entendit ensuite un déclic qui l’intrigua et qu’il chercha à identifier, repoussant la douleur et la brûlure du sang dans ses yeux, crachant quelques morceaux de dents brisés qui avaient subsisté sur sa langue. On l’avait battu à plusieurs, longuement, jusqu’à ce qu’il s’écroule.


Sa monture remua, tandis qu’il sentit une lame pénétrer son pantalon, le déchirant sur la longueur. Il voulut se débattre, se mit à hurler tandis que l’écrivain déchirait son fond de pantalon en hurlant comme un fou.


-  Pas assez de profondeur? Je vais t’en donner de la profondeur!


L’éditeur reçut plusieurs coups qui l’assommèrent presque, son front et son menton heurtant l’asphalte avec force. Sa vision se brouilla de ténèbres et l’air frais couvrit son fessier dénudé. Des pas s’approchèrent de lui et il vit des souliers Adidas rouges aux lacets jaunes. Il voulut fermer les yeux de peur d’être frappé, mais ce qu’il vit était bien pire. On plaça devant son regard un de ces objets sexuels en forme de pénis, d’une grosseur inhabituelle. Le peu de lumière qui tombait sur eux se reflétait sur la pièce qu’on avait enduite de lubrifiant.


Il se figea de terreur, son agresseur s’était penché et lui murmura à l’oreille.


-  Je vais t’en donner, salaud, de la profondeur.


Les cris de l’éditeur se perdirent dans la végétation aux abords des Grottes de Medous, un lieu hautement touristique où il avait décidé, ce soir-là, de se promener seul.


***


Alexandre ouvrit les yeux, son corps le faisait souffrir, bouger était devenu une épreuve presque insurmontable. Il se redressa, mais dès son premier mouvement, une poigne agrippa sa chevelure. Son front dégarni était une plaie recouverte de sang en partie coagulé. On le traina sur une dizaine de mètres. Il trébuchait, se retenait au bras qui le tirait ainsi. Tout autour, on bougeait aussi, suivait sa progression dans une sorte de caravane macabre. Il reconnut l’endroit, était non loin du parc de stationnement où il avait laissé sa voiture. La forêt l’entourait et ils suivaient un petit sentier de terre battue.


Celui qui le retenait le lâcha enfin, mais on le poussa au sol, contre des buissons épineux où il s’affaissa.


L’éditeur tomba pour la deuxième fois et, levant le regard vers le ciel couvert par la végétation des arbres, murmura.


« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? »


Une jeune écrivaine se plaça devant lui, sans peur de montrer son visage. Il la reconnaissait, avait refusé un texte érotique de science-fiction qu’elle lui avait confié. La femme le toisa avec rancœur, méchanceté, et une haine impossible à dissimuler. Elle était habillée de noir, se fondait presque dans l’obscurité de la nuit qui l’entourait. Elle se pencha vers lui, tandis que l’homme effrayé voulut se soustraire à son approche, mais en vain. Il y avait trop de douleur en lui, trop de plaies et de blessures pour qu’il puisse même respirer sans faire la grimace. Les buissons épineux le retenaient aussi, les épines pénétrant sa peau, cherchant à déchirer l’épiderme. L’écrivaine parla.


-   La ligne éditoriale de ta maison d’édition? Tu te souviens? Nous sommes dans l’obligation de refuser votre texte, parce qu’il ne correspond pas à ce que nous recherchons dans le cadre de notre ligne éditoriale…


Le regard paniqué de l’éditeur chercha la présence des autres créateurs fiévreux, vit plusieurs silhouettes en retraits, bières et cigarettes à la main. Il s’était toujours méfié des écrivains et savait ces personnages instables, capables des actions les plus folles. Quel être sensé aurait eu l’idée de passer ses journées entières à créer des histoires imaginaires, à vivre dans un monde de rêve et d’illusions? Il fallait être un peu fêlé pour croire qu’être auteur était un vrai métier.


La femme le gifla avec force, ses bagues creusant la peau de sa joue.


-  Regarde-moi, chien galeux!


Il leva les yeux sur elle et découvrit que son autre main tenait un petit rouleau de corde, de celle qu’on utilise pour la pêche. L’auteure souriait à pleine dent.


-  Ta ligne éditoriale? Je vais te montrer une vraie ligne… de pêche…


Elle déroula la ligne en questions et il vit les hameçons, nombreux, qui s’y trouvaient.


Elle avança ensuite vers lui.


***


Un hurlement réveilla Alexandre et il comprit rapidement que c’était le sien. Il était couché à même le sol froid, pouvait entendre le grondement de la chute à proximité. Il avait émergé de l’inconscience en espérant que tout n’avait été qu’un cauchemar. Mais en levant ses mains devant son visage, un seul œil s’ouvrit, il contempla sa peau parcourue de coupures laissées par le mince fil de pêche. En touchant son visage d’une main tremblante, il découvrit que plusieurs des hameçons y étaient encore accrochés.


La peur d’une nouvelle attaque le fit se retourner en tous sens, les bras levés afin de se protéger. Aucune menace immédiate ne se présenta, mais il n’était pas dupe. C’est pourquoi il prit le temps de s’asseoir, tout en gémissant, se défaisant du mieux qu’il put de la corde qui courrait sur tout son corps. Elle ne l’avait pas manqué et qu’il puisse être en vie représentait un vrai miracle. Il était toutefois faible, perdait beaucoup de sang.


La chute se trouvait sa droite, grondante, et projetant dans l’air un fin voile d’humidité.


Sur sa gauche, il vit une silhouette encapuchonnée, un homme qui l’épiait en silence. L’éditeur se raidit, ses tremblements impossibles à contrôler. Il avait si froid. Se mit à pleurer, sans honte, sans retenue. Il n’en pouvait plus.


L’écrivain qui s’approcha et s’arrêta devant lui était un ami. Du moins, l’avait été. Quelques semaines plus tôt, ils s’étaient disputés au sujet du nouveau roman de ce dernier. Une œuvre violente, trop violente pour qu’il la publie sans crainte de représailles. Il s’était dit qu’aucun libraire ne voudrait de cette œuvre malade et le lui avait dit.


Alexandre ferma les yeux, laissant les dernières larmes couler sur ses joues, glissant sur les plaies, autour des hameçons enfoncés dans la peau.


«Père, entre tes mains je remets mon esprit.»


Au sol pour la troisième rencontre avec un des monstrueux créateurs sanguinaires, l’éditeur patienta. Il n’avait plus la force de protester. La silhouette s’arrêta à moins d’un mètre, le frappa aux jambes d’un coup de pied pour qu’il le regarde, ce qu’il fit. La voix de son ami s’éleva comme une sentence de mort.


-  Nous ne saurons pas défendre efficacement ton ouvrage en librairie? Tu te souviens de m’avoir dit cela?


L’éditeur resta sans réaction. L’ami se pencha pour s’agenouiller sur le sol humide et il prit le menton couvert de bave, sang et morve de l’homme, qu’il souleva. Leurs regards se croisèrent un moment et l’écrivain parla à nouveau.


-  Je vais te donner une dernière chance de défendre quelque chose.


Il se releva, se recula et rejoignit les autres, en retraits, qui formaient un groupe silencieux. Alexandre vit les bâtons de baseball, de golf et les branches dont on s’était armé.


L’éditeur se mit alors à rire.


Sa maison d’édition déposerait aujourd’hui son bilan, un bilan des plus désastreux.


La meute bruyante s’élança ainsi vers lui, comme un seul homme.


Bien après sa mort, les bêtes du clavier s’activaient toujours sur sa carcasse inanimée.


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Published on January 17, 2014 10:29

January 12, 2014

Le manuscrit refusé ou d’où vient cette corde ?

La corde


Tout a commencé par une simple lettre. Laissée un mardi matin dans la boîte qui m’était destinée. J’ai découvert le courrier dans l’après-midi, au retour du travail. J’ai pris la pile de documents et l’ai emporté dans la cuisine, où elle s’est retrouvée sur la table en bois qui me vient de mon grand-père, un homme extraordinaire qui s’est autrefois rebellé contre l’envahisseur nazi. Un héros de la résistance française et un sacré bonhomme.


Ce n’est que six heures plus tard, légèrement intoxiqué par la bière, que je suis revenu à ces lettres empilées sur la table. Ce n’est que dans les affres de l’ivresse que je trouve le courage d’affronter les factures impayables qui s’accumulent un peu partout. J’ai ouvert les enveloppes, notant distraitement les noms de ceux qui désiraient me soustraire cet argent qui me manque gravement. La compagnie de téléphone, une lettre de la banque pour réclamer des fonds afin de couvrir les paiements mensuels pour la maison et finalement, une agence de collection qui voudrait bien me soutirer quelques dollars pour couvrir une visite à l’hôpital d’il y a quelques années.


J’ai tout jeté à la corbeille, j’en avais plusieurs autres copies.


Il ne me restait qu’une seule lettre à la main. Je l’ai soulevée à la lumière de la cuisine. Un logo se trouvait dans le coin supérieur gauche, éveillant ma curiosité. Un symbole en noir et blanc, une sorte de signe chinois avec une tête de dragon vaguement serpentine. Le front plissé, sans pouvoir déterminer l’origine de la lettre, j’ai déchiré l’enveloppe afin de dévoiler son contenu.

Une seule feuille se révéla à moi. Trois mots que je lus à voix haute avec perplexité.


« Toc, Toc, Toc »


Au même moment, on frappa à la porte et sous l’effet de la surprise, le document me glissa entre les doigts, effectuant un vol plané vers le sol insalubre. Je reculais de stupeur devant la coïncidence, trébuchant sur les bouteilles d’alcool vides. Le tumulte fit déguerpir mes chats paniqués. Je parvins à éviter la chute, me tenant contre le mur froid à mes côtés.

Incapable de bouger, je fixais la porte d’entrée et vit que la poignée remuait. Je n’avais pas verrouillé, qui oserait venir ici, sur ma montagne inhospitalière du Cantal par un aussi mauvais temps?


La porte s’ouvrit en grinçant et parut aspirer toute clarté hors de la pièce. En fait, l’électricité fut coupée à ce moment même, les appareils ménagers cessèrent d’émettre leurs faibles plaintes continuelles.


Une silhouette inconnue et tout à fait humaine s’engouffra dans ma résidence, suivit d’une froideur hivernale qui prit d’assaut l’ensemble des pièces sombres. Je voulus bouger, parler, mais l’ivresse et la surprise me paralysaient presque, puisque je pus cligner des yeux avant que le nouveau venu m’assomme d’un gourdin. Le coup m’atteignit directement au visage, envoyant valser l’éternelle cigarette du coin de ma bouche. Elle atterrit sur le canapé d’une autre époque.


***


J’ouvre les yeux, un mal de tête horrible emplit mes oreilles d’un vrombissement. Tout est noir, je vacille dans les ténèbres de mon aveuglement. Je dois prendre quelques moments pour laisser mon corps et mon crâne se stabiliser.

Au bout de quelques secondes, malgré la douleur sur mon visage massacré, je peux enfin me concentrer sur ce qui m’entoure. J’ai évidemment quelque chose qui me recouvre la tête, m’empêchant de voir la pièce dans laquelle je suis. Il fait froid, très froid, au point de me demander si je suis dehors. J’ai les mains attachées derrière le dos, les liens entaillent ma peau. Mes chevilles ont aussi subi le même traitement. Une poutre dans mon dos me retient debout.

C’est simple, on m’a fait prisonnier. Je passe aussitôt en mode analyse, faisant défiler la liste de mes ennemies dans mon esprit inquiet. Il y en a trop, c’est une perte de temps. Même en éliminant les maris cocus et les salauds que j’ai virés de mon compte Facebook, la liste est de plusieurs milliers de noms.


Des pas s’approchent, raclant le sol qui me parait être en béton, pour s’immobiliser devant moi. J’entends le bruit d’une allumette qui frotte une surface rugueuse, s’enflamme et le souffle d’un homme qui allume une cigarette. J’ai la bouche sèche et prendrait bien une bouffée de cette clope.


L’homme devant moi se racle la gorge et me parle, sa voix m’est inconnue, me fait penser à un claquement de fouet.

-    Romain? Je vois que vous êtes éveillé, mon ami.

-    Va te faire foutre!

Il se met à rire et d’un mouvement brusque, retire la chose qui me recouvrait la tête. Je vois aussitôt l’intérieur d’un vieil entrepôt désaffecté, humide et en mauvais état. Une lampe posée à proximité assure une certaine luminosité. Il fait nuit au-dehors, je peux voir les étoiles dans certains trous au plafond.


Je regarde l’homme, mais ne le connais pas. Du coup, il me fait penser à Raël, avec une petite barbiche et un front dégarni. Il est en train de m’épier, tout en fumant. Il tient une pile de feuilles dans sa main droite. Il fait quelques pas, propulsant sa fumée directement sur mon visage. Il y a un quelque chose de troublant dans son regard, comme un manque de compassion, une froideur dangereuse. C’est un maniaque, j’en suis convaincu.

-    Nous avons lu votre manuscrit, Monsieur Romain.

-    Mon quoi?

Je ne comprends pas tout de suite ce dont il parle. Mon manuscrit? Est-ce donc la pile de documents qu’il trimballe avec lui? Cela n’a aucun sens. Il poursuit.

-    Vos contes du montagnard. Nous les avons lus.

Que dire dans une telle situation? Alors que je suis ligoté comme un saucisson, retenu debout par une poutre dans mon dos? Merci? Estomaqué, je l’observe qui tourne autour de moi comme un vautour flairant sa proie. Sa démarche est particulière, il sautille chaque fois que son pied gauche touche le sol. Il revient se planter devant moi, j’en profite pour chercher autour de nous le moindre élément pouvant m’être utile afin de me libérer. Je ne vois rien. Nous sommes seuls, ou presque. L’étranger parle à nouveau.

-    Johnny?


Un individu quitte la pénombre où il se réfugiait, s’approchant d’un pas lent. Il porte un masque de Ronald Reagan, dissimulant son visage, et des vêtements noirs. Il tient quelque chose à la main, qu’il garde dans son dos. Je commence à avoir peur. Je hurle ma colère.

-    Mais qu’est-ce que c’est que cette connerie?

Raël se met à rire avec exagération, soulevant les documents pour me les montrer. Il s’agit bien de la page couverture de mon manuscrit. Je l’ai envoyé à plusieurs éditeurs, quelques mois plus tôt.

-    Cette connerie, comme vous le dites si bien, Monsieur Romain, est de nous avoir pris pour des cons.

Il lance la pile de feuilles en l’air, provoquant une pluie temporaire de pages couvertes d’annotations en rouge.

-    On ne s’adresse pas impunément aux éditions LongCouPublishing.

Sur ce, il exécute une étrange danse, tournant sur lui-même en battant des bras, une pauvre imitation d’une corneille en détresse. Sa chorégraphie se termine par un cri bestial qui résonne dans l’écho de l’entrepôt. Il me fixe à nouveau, comme si de rien n’était. J’ai un très mauvais pressentiment, aurait préféré un mari cocu. Ce fou me regarde avec une férocité de fauve.

-    Savez-vous qu’il nous a fallu deux jours pour lire vos contes?

-    Euh… non!

Celui qu’il a nommé Johnny n’a toujours pas bougé, ses yeux perçants et d’un rouge démoniaque braqués sur moi. Raël continu.

-    Est-ce qu’on confie un poupon à des parents, après la naissance, sans s’imaginer qu’ils s’investiront dans le travail difficile des années à venir?

-    …

-    Donne-t-on à un monarque un royaume sans lui faire comprendre les responsabilités de sa situation?

-    Écoutez… je…

-    La ferme!

Cette fois, l’homme à la barbichette à postillonner et la matière fluide s’est écrasé contre ma jambe. Il tremble de la tête aux pieds, la sueur recouvre son front dégarni. Il rit nerveusement et je sais qu’il n’a pas toute sa tête. Je comprends maintenant qu’il est vraiment un éditeur.


Il reprend.

-    Votre manuscrit est refusé, Monsieur Romain. Votre texte ne nous a pas plu.

Comme tout écrivain, ce n’était pas ma première fois. J’ai une pile de lettres de refus dans mon bureau. Assez pour m’en torcher le cul pour le reste de mes jours. Mais le procédé particulier de cet individu m’apparaît des plus étranges. Me faire enlever, séquestré parce qu’on a refusé mon manuscrit, c’est nouveau.

-    Aux éditions Longcoupublishing, nous prenons les choses au sérieux. Johnny, il est temps de montrer à monsieur Romain ce qui lui est réservé.

L’homme fait un geste de la main, paraissant soudain désintéressé par ma présence. Il se retourne et s’avance vers la zone d’ombre devant lui. Je l’interpelle.

-    Qui êtes-vous?

Il me répond sans se retourner.

-    Vous pouvez m’appeler Alexandre le Grand. Seigneur, Dieu, chevalier des mots et libérateur des idées. Je suis l’Être suprême.

Sur ce, il s’éloigne, me laissant pantois devant autant d’arrogance. Enfin, venant d’un éditeur, il fallait prévoir un tel comportement.


Le nommé Johnny s’avance vers moi et je peux enfin contempler ce qu’il tient à la main. Une corde. Je tente de me débattre sans y arriver. Les liens me blessent et écorchent ma peau. L’homme déploie sa corde au nœud coulant, me la passe autour de la tête.

Je hurle, l’insulte, lui crache dessus, sans effet. Johnny resserre le nœud coulant et la corde épouse la forme de mon cou. L’homme retient un bout de corde et s’éloigne de quelques pas. Il ramasse ensuite une page du manuscrit, qu’il examine avant de me la montrer. Les yeux emplis de larmes, je lis une phrase écrite d’une encre rouge dans la marge.

« Texte avec un certain potentiel. Les personnages ont une profondeur psychologique très bien travaillée. L’action s’enchaîne sans lenteur, tenant le lecteur aux aguets. »

Consterné par ces commentaires positifs, je hurle, la morve atteignant ma lèvre supérieure.

-    Je ne comprends pas, pourquoi l’avez-vous refusé? Pourquoi me faites-vous cela?

Johnny hausse simplement les épaules, souriant peut-être sous son masque.


Il tend ensuite la corde, malgré mes protestations, mes hurlements frénétiques et il tire de toutes ses forces, soulevant mon corps du sol. La douleur est atroce, j’étouffe et mes pieds liés ensemble battent l’air dans le vide.

Mes cris deviennent des gargouillements faibles.

Johnny attache la corde à une poutre, retire une bouteille de Jack Daniels de son manteau et s’assoit à même le sol, sur les feuilles du manuscrit.

Un manuscrit refusé.


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Published on January 12, 2014 08:35

January 3, 2014

2014

2014


L’enfant se redressa sur la couchette sale et puante. Nu, il se gratta la tête, faisant fuir les insectes qui rampaient sur son cuir chevelu. Il se mit debout sur le matelas aux ressorts ayant protesté de ses mouvements durant sa courte nuit agitée. Il renifla et cracha au sol.


Une faible luminosité venant de l’extérieur filtrait par des interstices à la fenêtre. Celle-ci avait naguère été bouchée à la hâte avec des planches de bois. Les rayons grisâtres qui perçaient tout juste les ténèbres ambiantes révélèrent un document qui tapissait le mur. Couvert de poussière, on ne pouvait en lire le contenu.


L’enfant bâilla, se jetant au bas de la couchette d’un bond agile. L’impact de ses pieds nus sur le carrelage froid fit déguerpir un vieux chat au pelage n’ayant subsisté que par endroit. Un hurlement de colère suivit la fuite de l’animal rendu fou par la faim. On l’entendit dans le couloir sombre qui butait contre les murs, faisant chuter des boîtes ou des débris quelconques.


Lorsque le silence retomba à nouveau, incapable de déterminer si c’était le jour ou la nuit, le petit qui ne devait avoir que huit ans s’approcha du document. À mi-chemin, il s’immobilisa, une grimace sur le visage. Il urina à même le sol, sachant fort bien qu’il ne reviendrait jamais dans cet endroit, qu’il lui faudrait poursuivre son errance.


Il s’était habitué au froid, à la faim qu’il arrivait temporairement à combattre. Capturer des rats et nettoyer les carcasses d’animaux morts consistaient en ses repas quotidiens. Les insectes lui offraient aussi une bonne source de protéines. Le problème était de trouver de l’eau potable, les pluies acides laissaient des souillures noires sur les surfaces, traversant péniblement les nuages opaques qui bloquaient le ciel en permanence.


L’enfant se plaça finalement devant le document, qu’il épousseta d’une main. Il reconnut un calendrier, aux pages qu’on pouvait tourner afin de dévoiler une image différente pour chaque mois.


Il était ouvert sur janvier 2014.


À cet instant, les explosions reprirent, faisant trembler le sol et les rugissements des bombardiers s’élevaient comme le chant funèbre d’insectes s’abattant sur une récolte vulnérable. Il sut que le jour s’était levé.


La photographie du calendrier, pour le mois en question, représentait une forêt verdoyante longée par un pré dont l’herbe était courbée sous une brise invisible. L’image était belle, symbole d’une période à jamais révolue. Il ne restait plus rien de tout cela, les cités, les campagnes n’étaient plus que dévastation, débris et destructions. La mort peuplait les anciennes capitales de ces contrées enlisées dans un conflit sans fin, sans but, sans logique.


De la poussière tombait du plafond instable et qui menaçait de s’effondrer à tout moment. Le gamin hésita à s’emparer du document, mais préférait ne pas s’encombrer, il lui était plus facile de fuir ainsi.


Il s’élança donc vers le couloir, puis vers la sortie du bâtiment, ses pas accompagnés par le tumulte régulier des explosions, des bombes qui rasaient la cité.


Il se devait de fuir avant l’arrivée des troupes terrestres, qui n’épargnaient personne.


Il disparut au bas de l’escalier devant le repaire qu’il abandonnait, longeant les immeubles encore debout afin de s’éloigner du centre de la ville en décombres. Des colonnes de fumée montaient et rejoignaient les gros nuages noirs qui bloquaient les rayons du soleil ou de Lune.


Non loin derrière lui, le chat trottait à sa suite.


 


 


 


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Published on January 03, 2014 12:54

Sortie des numéros 98 et 99 de la revue québécoise HORRIFIQUE

Reblogged from Romain BILLOT:


Petit doublet de fin d'année 2013, mes nouvelles "Question de confiance" (SF Horrifique) et "Sur le seuil" (Fantastique) sont au sommaire des numéros 98 et 99 d'Horrifique le plus vieux sexyzine d'horreur du Québec. Un troisième texte "L'esprit de camaraderie" (Thriller) sera au programme du 100ème numéro !


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Published on January 03, 2014 12:36

December 19, 2013

Lecture de Cancer de Mathieu Fortin

Cancer


Mathieu Fortin est un écrivain québécois originaire de La Tuque, en Mauricie. Bien connu des lecteurs de l’imaginaire, sa bibliographie est impressionnante et aussi le reflet de son incroyable talent. Il est aussi un des mes écrivains préférés.


J’ai eu le privilège de discuter avec Mathieu à quelques reprises et même de le rencontrer au Salon du livre de Montréal en 2012.


J’avais lu « Le Serrurier », « Le Protocole Reston », « La volonté d’Odi » et « Le loup du sanatorium ». J’ai aujourd’hui l’immense plaisir de vous faire découvrir son petit dernier aux Éditions Coups de tête.


Cancer.


Il s’agissait à l’origine d’une nouvelle littéraire publiée dans la revue québécoise « Solaris » et qui fut retravaillée afin d’en faire un roman. Je n’ai malheureusement pas eu la chance de lire la nouvelle originale, elle manque à ma collection d’écrits de Mathieu Fortin.


 Voici un résumé de l’histoire :


Éthan souffre d’un cancer fulgurant. Son médecin lui propose un traitement révolutionnaire non homologué, dans une clinique secrète du Texas. Éthan, au bout de ses ressources et désirant survivre peu en importe le prix, accepte. Tandis qu’il se retrouve dans ce centre médical ultra secret et dont on ne protège pas tant les entrées que les sorties, et où une série d’effets secondaires inattendus l’assaillent, plusieurs morts suspectes surviennent dans des hôpitaux de la ville de Québec. Le sergent détective et sa collègue chargés de l’enquête se buteront à de nombreuses portes fermées, mais leur instinct finira par les mener sur la bonne piste, lorsqu’une mort de plus attirera leur attention sur un traitement génétique inconnu de tous et de toutes.


 Ce que j’en pense :


Comme dans ses autres livres, Mathieu écrit comme il pourrait nous parler, sur un ton de confidence, sans nous compliquer la vie de phrases inutiles et de jeux de mots intellectuels ennuyants. Une belle plume qui nous charme, un ton complice et intime qui nous permet de nous rapprocher des personnages, de mieux vivre les actions auxquelles ils sont confrontés.


Dans Cancer, nous suivons les méandres d’une enquête policière qui s’amorce dans un centre hospitalier. À ce point, on pourrait parler d’un roman policier, avec une panoplie de détails scientifiques cohérents et vulgarisés. Nous suivons donc la dynamique ambigüe de deux inspecteurs, que j’imagine facilement redécouvrir un jour dans une série d’enquêtes, puisqu’ils sont attachants. Une suite Mathieu?


J’ai grandement apprécié la manière dont l’action est scindée entre les détectives et les patients de l’institut. Avec expérience et savoir-faire, on nous permet de naviguer dans l’enquête du point de vue des inspecteurs et parallèlement de vivre l’action avec les patients de l’institut, des autres personnages du récit. Les éléments s’imbriquent les uns aux autres à mesure que nous tournons les pages.


Ma plus grande surprise dans ce roman est venue dans la révélation des résultats du traitement d’Éthan. Passons-nous ici de roman policier à une histoire de science-fiction? Je m’attendais à presque tout, sauf à cela. C’est le genre de moment où l’on se retrouve avec la bouche grande ouverte, un petit filet de bave sur le menton. D’habitude, dans mes lectures, j’aime émettre des hypothèses sur ce qui s’en vient, me préparer au choc final qui souvent est un pétard mouillé.


Ici, j’ai été battu à mon propre jeu.


Sans dévoiler la fin, je dois dire qu’elle m’a grandement étonnée.


Bref, c’est une lecture que je conseille, un livre qui se lit très bien et qui saura vous divertir.


Sylvain Johnson et Mathieu Fortin - Novembre 2012

Sylvain Johnson et Mathieu Fortin – Novembre 2012


Site des Éditions Coups de tête.


Cancer en librairie.


 


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Published on December 19, 2013 15:10

December 16, 2013

Apocalypse Snow d’Huguette Conilh

Apocalypse Snow


Une petite nouvelle de 16 pages. Une belle couverture, un titre intriguant.


Qu’est-ce qu’Apocalypse Snow? Un étrange récit, angoissant, et à mi-chemin entre le fantastique et la science-fiction. Un homme qui se réveille dans une maison, avec un gamin qu’il ne connaît pas. Au-dehors, l’enfer s’est déchaîné, la pluie est devenue une averse de sang qui macule la neige, qui assombrit le paysage.


Que peut-il bien se passer à la suite d’une telle introduction troublante?


C’est à vous de le découvrir en lisant la nouvelle. Je peux toutefois vous dire ceci : c’est une histoire surprenante. L’atmosphère du récit est intense à souhait.


C’est bien écrit et la fin me plaît beaucoup, elle laisse place à notre propre interprétation des évènements. C’est la quête de survie dans un monde qui n’est plus le même, entouré de forces qui nous dépassent. Qui nous ont précédés, qui nous survivront. Réflexion sur la collectivité humaine destructrice que nous appelons population terrestre.


Plusieurs flashbacks de films – Signs, La guerre des mondes, The happening… c’est tout cela à la fois et rien de tout cela.


J’y vois le potentiel pour un plus long récit.


Une lecture à conseiller durant cet hiver aux accumulations de neige importantes. Qui sait? Ce pourrait être votre seule chance d’être prêt lors de l’Apocalypse Snow!


Pour l’achat – c’est ici : Apocalypse Snow


 


 


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Published on December 16, 2013 06:27

December 15, 2013

"Histoires de Robots" : L'ebook N°5 des Editions de L'Imaginarius est en ligne !

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L'ebook "Histoires de robots", numéro 5 des Editions de L'Imaginarius, est en ligne !!!!


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Published on December 15, 2013 15:06

December 13, 2013

Akira 08-65 de Gaëlle Dupille.

Akira 08-65


Gaëlle est une de ces écrivaines que je retrouve toujours avec joie. Son écriture, ses thèmes et l’intensité de ses personnages en font une auteure à découvrir.


Dans Akira 08-65, elle nous entraîne dans un récit qui pourrait passer pour une nouvelle romantique ou dramatique, mais qui est à la fois une histoire de fatalité, de destinée et de science-fiction.


C’est un court récit d’une grande efficacité, une réflexion sur la vie remplie de mystère qui très souvent nous dépasse. L’homme et la femme ne peuvent vivre seuls, ils n’ont pas été « programmés » pour une vie solitaire. Il existe en chacun de nous une force qui nous pousse à vouloir aimer, à être accepté d’un groupe, une collectivité ou encore d’un être humain aux intérêts similaires. Ce besoin peut parfois aller au-delà de cette vie terrestre, au-delà de notre imagination limitée.


L’histoire se déroule dans un Japon futuriste, une époque ou les humains et les androïdes vivent en harmonie. Le mari d’une jeune scientifique contracte un dangereux virus, peut-être même mortel. C’est une situation que tous craignent – de voir l’être cher souffrir ou être emporté dans le néant de l’après-vie. Mais est-ce que la vie pourrait être aussi simple? Bien sûr que non.


En lisant ce texte, vous vous demanderez ce qu’est l’amour, ce que nous, humains prisonniers d’une société manipulatrice, serions capable de faire pour ne plus être seul. Comment combler ce vide qui existe depuis la nuit des temps dans le cœur des hommes et femmes qui ont vécu, qui vivent et qui vivront.


Un texte ingénieux, un récit fluide qui conduit à une fin surprenante, agréable.


Un conseil, procurez-vous « Akira 08-65 » - C’est ici.


Vous ne connaissez pas Gaëlle Dupille ? Il n’est jamais trop tard – cliquez ici.


 


 


 


Filed under: Lectures
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Published on December 13, 2013 14:58