Christophe Claro's Blog, page 52
July 9, 2017
La fulgurence critique du jour
Lu dans la revue Bifrost n°86, sous la plume d'un certain "Org", cette prédiction mâtinée d'inquiétude au sujet du Jérusalem d'Alan Moore, à paraître le 30 août 2017 chez Inculte :
Qui sait? Peut-être l'ouvrage parviendra-t-il jusqu'à fasciner quelques lointains cénacles de province qui se shootent au Dauphiné Libéré ? En tout cas, le livre a déjà réjoui plusieurs dizaines de milliers de provinciaux anglais qui ne lisent sûrement que la Gazette de Manchester. C'est déjà ça.
Qui sait? Peut-être l'ouvrage parviendra-t-il jusqu'à fasciner quelques lointains cénacles de province qui se shootent au Dauphiné Libéré ? En tout cas, le livre a déjà réjoui plusieurs dizaines de milliers de provinciaux anglais qui ne lisent sûrement que la Gazette de Manchester. C'est déjà ça.
Published on July 09, 2017 03:50
July 8, 2017
Vortex Piment
Published on July 08, 2017 23:28
Films 19 & 20 : L'Enfance d'Ivan & Latifa – Fin du Festival…
L'enfance d'Ivan, d'Andreï Tarkovski, 1962Premier long métrage de Tarkovski, et déjà un émerveillement de bout en bout, ou plutôt de plan en plan, avec des flash-backs / souvenirs métamorphosés en rêves, la présence magique de l'eau-miroir, l'opposition légèreté/pesanteur. Appelé au pied levé pour remplacer le réalisateur qui devait tourner cette adaptation d'une nouvelle de Vladimir Bogomolov, et qui avait déjà mille cinq cents mètres de pellicule, Tarkovski, à peine la trentaine, imposa de tout changer (casting, scénario…) et de tout recommencer, évitant ainsi aux spectateurs ce qui aurait sans doute été un film patriotique de plus.&
Latifa, le cœur au combat, d'Olivier Peyon et Cyril Brody, 2017, 1h37
Documentaire sur le combat que mène Latifa Ibn Ziaten, cette femme dont le fils militaire a été assassiné par Mohammed Merah le 11 mars 2012. Les deux réalisateurs ont suivi Latifa dans ses nombreux déplacements et interventions pour parler aux jeunes, les mettre en garde contre la tentation du terrorisme, leur insuffler du courage, leur parler en toute simplicité. Infatigable et déterminée, à la fois sereine et brisée à l'intérieur, Latifa sait trouver les mots pour déverrouiller les cœurs des ados. C'est produit par Haut et Court, donc c'est bien. Sortie le 4 octobre.
***
Voilà, c'est la fin de cette série de brèves chroniques sur le Festival du Film de La Rochelle, où je me suis rendu pour la troisième année consécutive. Une semaine, une vingtaine de films. Des files d'attente d'une heure, toujours agréables. Des organisatrices impeccables. Des copies restaurées. Des avant-première en pagaille. Docu, fiction, débats, rencontres, ciné-concerts, you name it. Et cerise sur le gâteau: pas de compétition, rien que du bonheur. Bon, on éteint le projo et on rouvre un livre. En plus, jeudi, on se rend à La Baule pour participer à Ecrivains en bord de mer – on vous en parlera.
Published on July 08, 2017 21:40
Une petite pause en attendant la fin du monde
Published on July 08, 2017 09:53
Film n°18 – Le crime était presque parfait
Le crime était presque parfait, d'Alfred Hitchcock, 1954Quand on connaît bien un film d'Hitchcock, l'aventure ne fait que commencer. On peut à son tour mener l'enquête, soulever les coins, tendre l'oreille, grignoter des indices. Dans Le crime était presque parfait, on pourra donc se livrer à diverses investigations en apparence mineures, lever quelques lièvres prétendument discrets…
On s'amusera, comme dans L'ombre d'un doute, à repérer l'obsession pour le double, la paire, bref, la duomanie: 2 bas, 2 clés, 2 imperméables, 2 assassins, 2 hommes dans une vie, 2 hommes qui enquêtent, deux portes donnant accès au même espace, 2 pseudos pour l'assassin, etc. Comme le dit l'assassin à la fin du film: "La réalité et la fiction sont souvent deux choses différentes."
On pourra y chercher la présence du cinéaste, qui cette fois apparaît par ses initiales, avec en prime un clin d'œil à L'homme qui en savait trop, puisqu'il est question à un moment d'un certain "Albentall". C'est Tony Wendice qui dit avoir du mal à déchiffrer un nom sur l'agenda de sa femme Margot, laquelle lui fait alors remarquer qu'il s'agit en fait… du Albert Hall. ("Un de tes anciens amoureux. – C'est la salle de concert.") Ah ah ! AH.
On s'amusera de voir que le personnage de l'assassin courtise les femmes seules et les veuves pour leur argent, comme le Charlie de L'ombre d'un doute.
On notera que Tony Wendice est un ancien joueur de tennis, tout comme le Guy Haines de L'inconnu du Nord-Express…
Que le même Wendice, quand il compose le numéro de sa femme, commence par la lettre "M", pour "murder", bien sûr", mais ce "M" est aussi le double inversé du "W" qui commence son nom…
Enfin, le film s'achève sur le gentil inspecteur qui se peigne la moustache, or autrefois, dans les films muets, la moustache était l'attribut du méchant, comme c'est le cas dans le film Chantage, quand l'ombre d'un candélabre vient apposer une moustache au-dessus de la bouche du peintre qui s'apprête à tuer Alice (Hitchcock: "Autrefois, les méchants avaient une moustache et donnaient des coups de pied aux chiens"…). Mais cette fois-ci, la moustache est soigneusement peignée, les temps ont changé…
Published on July 08, 2017 01:28
July 6, 2017
Film n°17 – L'autobiographie de Nicolae Ceausescu
L'autobiographie de Nicolae Ceausescu, d'Andrei Ujica, 2010, 3hLa dictature roumaine mise à nue par elle-même. Une plongée en apnée dans vingt-cinq années de règne indivisible, composée uniquement de séquences filmées par et pour le pouvoir. Archives-propagandes.
Le parti pris d'Ujica est radical: ne montrer que la version officielle, en un montage accablant, sans commentaire critique, ne donnant à voir que la scénographie mensongère et à entendre que le discours lénininifiant et marxichiant qu'ânonne un Ceausescu enculté dans sa personnalité. Ça dure trois heures et c'est donc très long, mais ça permet de se faire une idée de ce que ça peut donner à une échelle historique sur vingt-cinq ans. Un champ sans contre-champ, donc, ou plutôt un champ sans hors-champ, puisque le peuple est bien présent, mais uniquement dans son rôle de figurant marionnette. Une vision amputée, un regard fixe de cyclope.
Ici, en Roumanie, tout n'est que luxe du faux-semblant, calme de la propagande et volupté de la manipulation. Discours officiels, visites à l'étranger, accueil des dirigeants étrangers, déplacements, interventions au parlement… rien ne nous est épargné. Tel un apparatchik usé par les rites momifiés de la doxa communiste, le spectateur oscille entre sidération et catatonie. Trois heures d'Histoire vidées de l'Autre. Le sur-moi du monstre froid dans toute sa cécité. Le rouge sans le noir. Et tout le temps, à chaque plan, un manque, une attente, une angoisse: ce qu'on ne voit pas, ce qu'on ne dit pas. Au début et à la fin du documentaire, en unique contre-point, les époux Ceausescu sont interrogés par ceux qui les ont détrônés. Les deux camps se renvoient un même mot pour définir que ce chacun ressent vis-à-vis de l'autre, un même mot pour dire et la vérité et le mensonge: mascarade.
Published on July 06, 2017 23:15
Film n°16 – L'Ombre d'un doute, d'Alfred Hitchcock
L'Ombre d'un doute, d'Alfred Hitchcock, 1943, 1h43Un des films préférés d'Hitchcock, où la schize est particulièrement systématisée. Le personnage de Charlie Oakley – interprété par Joseph Cotten – est l'archétype du scindé: longtemps séparé de sa sœur, il aimerait renouer avec cette symbiose mais ne parvient pour l'instant qu'à s'intéresser à la moitié du couple: la veuve, source de revenus. Il est traqué par deux policiers, qui eux-mêmes traquent deux hommes. Sa nièce, qui elle aussi se fait appeler Charlie, est fasciné par son oncle mais également par un des deux policiers. Le père de la jeune Charlie forme un couple avec un voisin – chacun imagine des façons parfaites de tuer l'autre. Oakley essaie par deux fois d'assassiner sa nièce – la troisième lui sera fatale. La nièce traverse deux fois le même carrefour, en prenant à chaque fois un risque. Elle a un frère et une sœur. La maison a deux entrées différentes, qui jouent chacune un rôle important. Sa chambre devient la chambre de son oncle. Bien sûr, à traquer le deux, le double, on n'en finirait pas d'en trouver des manifestations. C'est tout le génie du film: partir de la schizophrénie pour en arriver à la paranoïa. Hitchcock, ou comment faire du doute une pathologie virale…
Published on July 06, 2017 09:24
July 5, 2017
Film n°15: Andreï Roublev
Andreï Roublev, d'Andreï Tarkovski, 1969 (tourné en 1966), 2h45Là encore, impossible et vain de revenir sur ce film en quelques lignes. Arrêtons-nous donc sur le prologue qui, comme c'était le cas pour Le Miroir, tient une place autonome et profondément métaphorique. On y voit (très brièvement, car on a surtout son point de vue subjectif) un dénommé Yefim occupé à la préparation d'un ballon à air chaud, au moyen duquel il s'envole, in extremis (ils sont attaqués…) du haut d'une église – l'église de l'Intercession-de-la-Vierge. Il survole alors le paysage, rase les eaux de la Nerl (on est Bogolioubovo) et plane au-dessus du couvent, avant d'atterrir en catastrophe.
Avant de narrer la vie du peintre Andreï Roublev, dont on sait fort peu de choses, le cinéaste s'est donc concentré sur cet étrange homme volant, s'inspirant d'un certain Furvin Kriakutnoi, lequel aurait précédé les Montgolfier dans leur invention, et aurait effectué un premier vol au début du 18ème siècle aux environs de Kostroma.
La scène est haletante. Il y a urgence. Des soldats attaquent de partout, tentent d'empêcher l'ascension. La ballon est une chose grossière, une espèce d'animal informe à la peau rugueuse, qui enfle et se cabre au milieu des cris et des échauffourées. On peine à trancher les longes qui le retiennent au sol. Une fumée noire et grasse pénètre difficilement dans ses entrailles. Enfin il s'émancipe, s'arrache, monte. On entend Yefim s'émerveiller, rire, se moquer des hommes cloués au sol, on le sent balloté entre la surprise et la joie.A la libération de cette forme répond, dans le film, une autre scène de "formation", celle de la cloche monumentale que fait construire Boriska, qui pourtant n'a pas hérité le secret de sa fonte. La cloche et le ballon forment pour ainsi dire les parenthèses du film. Deux formes creuses, nées d'une pure volonté, travaillées à l'instinct et dans la précipitation, chacune motivée par la nécessité de sauver sa peau (Yefim est attaquée; Boris risque la décapitation en cas d'échec). Deux formes qu'il va falloir ouvrir au sens. Et entre les deux, la vie de Roublev, ses stations de croix, ses doutes, ses renoncements, son entrée dans le silence puis sa décision de se remettre à peindre.
L'air chaud de l'audace envahit la toile rugueuse, le vent furieux du battant anime la cloche. L'envol est un pari contre les hommes, un acte de foi, un combat contre le vide. Un cadre en expansion, en attente de résonances.
Published on July 05, 2017 23:59
Film n° 14 – L'homme qui en savait (un peu) trop…
L'homme qui en savait trop (version anglaise), d'Alfred Hitchcok, 1934Vingt-deux avant la version américaine que tout le monde connaît, Hitch ébauche son premier "homme qui en savait trop". En filigrane, on reconnaît la fameuse trame, avec le coup de cymbales mais sans Daniel Gélin en djellaba. On rit beaucoup, et pas uniquement sur injonction du maître du suspens. La psychologie est souvent en mode "vous-m'en-direz-tant" et finit par donner l'impression qu'on regarde en transparence un Buñuel fantôme. Le montage est à l'avenant, comme si on battait des cartes. Bizarrement, le film est traversé par une obsession alimentaire – quand la mère parle enfin à sa fille kidnappée au téléphone, c'est pour lui demander si elle mange correctement. Fait à son tour prisonnier, le père s'attable avec les malfrats et casse la croûte. Au début du film, la fillette veut à tout prix dîner avec ses parents (après avoir gâché deux épreuves sportives, l'air de rien)… On retiendra surtout une scène d'anthologie dans une église, où se déroule un lancer de chaises stupéfiant. Il y a aussi Peter Lorre, horriblement à l'aise et ricanant. Ah, j'oubliais, il y a un méchant dentiste qui préfigure celui de Marathon Man – mais là, c'est vraiment "sans danger".Bref, c'est very british dans l'humour – le père ne cesse de vanner même dans les pires situations. Un plan est entièrement dévolu à un éternuement complètement dépourvu de sens. Je laisse les psys analyser cette étrange fonction-atchoum. Comme quoi, il est toujours possible d'évoluer…
Published on July 05, 2017 06:24
July 4, 2017
Film n°13 : Le Tambour, Volker Schlöndorff (Festival du Film de La Rochelle)
Le Tambour, de Volker Schlöndorff, 1979, 135 mnRatatata-tata-tata ! Bruit du tambour? Bruit des fusils? Bruit des conversations? Le petit garçon suisse de onze ans qu'était David Bennent commençait alors tout juste sa carrière. Son père, Heinz Bennent, vous le connaissez, il joue le personnage de Greff dans Le Tambour, mais aussi le rôle du Pr. Blorna, dans L'Honneur perdu de Katharina Blum, également projeté à La Rochelle, on vous en causera. Dans Le Tambour, il est Oscar, omniprésent, se jetant dans la cave, perché en haut d'un clocher, refusant l'école, empêchant un coït interruptus, faisant éclater des verres, des vitres, des lunettes, perturbant un rallye nazi, se produisant sur scène, découvrant l'amour, la jalousie, observant les adultes de ses grands yeux tantôt curieux tantôt furieux, contraint de boire du potage à la pisse et au crapaud, de fréquenter les nazis, se cachant, courant, engendrant, traversant la guerre… Cherchant la chaleur sous les jupes-mondes de sa grand-mère.
Le tambour qu'il ne quitte pas est son miroir à lui, renvoyant au monde l'image de sa cacophonie, de sa discordance, mais aussi de l'aride monovocalisme de sa haine. Sans cesse abîmé, défoncé, le tambour d'Oscar renaît, grâce aux bons soins du vendeur de jouets juif qu'interprète Aznavour. Il est le cercle de l'enfance, qu'il faudra bien un jour crever. Il est la mesure primitive, le signal de la catastrophe, le virus. Ratatata-tata-tata!
On reverra David Bennent, entre autre, dans Legend, de Ridley Scott. On le retrouvera avec Spike Lee, qui le prendra en 2004 dans She Hate Me, puis dans le film que tournera Schlöndorff en 2007, Ulzhan. Récemment, il jouait dans le Michael Koolhaas d'Arnaud des Pallières, 2013.
Published on July 04, 2017 23:53
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