Dernier avis avant démolition Quotes

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Dernier avis avant démolition Dernier avis avant démolition by Fabien Maréchal
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“L’homme est ainsi fait que, quand il ne voit pas de nuage, il a besoin d’en trouver un pour se rassurer. S’il ne voit pas un malheur s’avancer, il se dit que la prochaine catastrophe, pour être aussi bien dissimulée, elle sera d’ampleur, aussi vaut-il mieux tout de suite œuvrer à mettre des nuages dans le ciel, des nuages qu’on connaît, ce n’est pas d’aujourd’hui qu’on meurt de faim ou noyé ou lépreux ou bombardé à travers le monde, mais le soleil, allez savoir ce que ça cache, d’ailleurs si on le regarde en face, ça rend aveugle, c’est bien la preuve.”
Fabien Marechal, Dernier avis avant démolition
“Nul n’est obligé d’être heureux. Si le bonheur devenait un impératif légal, tous les tribunaux du monde ne suffiraient pas à condamner les délinquants.”
Fabien Marechal, Dernier avis avant démolition
“Dans la maison, le téléphone sonne dans le vide. Toutes les cinq minutes, ça recommence. On voudrait prendre racine qu’il se trouverait toujours un emmerdeur pour vous scier.”
Fabien Marechal, Dernier avis avant démolition
“Paulin est un costaud à la barbe entortillée dont la conversation achoppe rapidement sur les monosyllabes. Cinq jours par semaine, il est photographe numérique à Paris : il joue des épaules lors de shootings de stars ou de conférences de presse ministérielles, et loge dans un hôtel pouilleux qui finira de passe. Le vendredi soir, il monte dans une longue Citroën CX mangée par la rouille pour rejoindre l’arrière-campagne où il se retranche chaque week-end.
Trois cents bornes plus tard, des lapins font rebondir leur queue blanche dans le faisceau des phares. Des ornières longent un bosquet de pommiers jusqu’à une masure paysanne en pierre volcanique. Paulin pousse la porte en bois percée d’une chatière. Des poutres de deux empans traversent la pièce basse, et on cuirait tout un cochon de lait dans la cheminée. Quand l’orage fouette le toit d’ardoise, ployant la cime des arbres, la maison évoque le refuge d’un gardien de phare à jamais éteint.
Le samedi et le dimanche, après le déjeuner, Paulin remonte son pré jusqu’aux pommiers. Il emporte le minimum : un vieux reflex Nikon, deux pellicules 100 et 200 iso, un objectif 50 mm, un 300 mm, et deux cannettes de bière.
Son chat gris grimpe à un arbre et se couche sur une branche basse. Paulin s’allonge sur le dos, ferme l’œil gauche, colle le droit au viseur, pointe l’objectif vers le ciel et s’adonne en argentique à la pêche aux nuages. Pour lui les cumulus dessinent des hommes du palais et de la rue, des animaux ordinaires, légendaires ou disparus. S’il fait chaud, Paulin rampe sous le bosquet. Parfois il sent un vaisseau battre dans la paupière de son œil clos, puis celui du viseur se ferme à son tour et, petit à petit, l’objectif de l’appareil rejoint l’oseille sauvage et les coquelicots. (« Le Monographe »)”
Fabien Marechal, Dernier avis avant démolition