L���objectophile

Note de l���auteur:


Ce petit texte m���a ��t�� inspir�� lors de lectures concernant la diff��rence entre le livre papier et num��rique. Beaucoup de gens parlent de l���avantage du livre papier. Ils aiment l���odeur d���un bon vieux bouquin, le ����feeling���� qu���il procure. Mon esprit tordu �� tout de suite pens�� �� quelque chose que j���ai couch�� sur papier. Ne soyez pas offens��, ce n���est pas un texte accusant les amateurs de livres papier d�����tre des monstres ni une propagande pour le livre num��rique.


Juste un petit texte con, par un ��crivain con, un lundi encore plus con. Une excuse pour repousser mes corrections, pour passer le temps.


Merci.


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L���objectophile


��J���en ai vraiment marre. Dans l���autobus, au bureau, dans la salle d���attente du docteur, sur Facebook, partout o�� je vais, on ne cesse de me parler de ces tablettes et autres machines permettant la lecture de livres num��riques. Foutaises! Je n���ai aucune intention de m���approprier un de ces objets aberrants. Je pr��f��re, et de beaucoup, le bon vieux livre papier r��confortant. C���est d���ailleurs ce que je suis en train de faire, lire un nouveau livre de mon ��crivain pr��f��r��, Stephen King. Je suis au lit, en sous-v��tements, bien au chaud sous les couvertures. Un cognac sur ma table de nuit. Dire qu���en ce moment m��me, certains de ces zigotos sont en train de tripoter des engins plastifi��s pour lire��� quelle horreur!


Le livre est ferme dans ma main, il ��pouse la forme de mes deux paumes. C���est un contact suffisamment lourd pour me donner des frissons. Mes doigts agiles caressent la couverture, et je peux sentir le grain du papier, la lumi��re de ma lampe joue avec les reflets sur l���encre noire. Je me repositionne. Un livre, un vrai livre en papier, est quelque chose de sensuel. Son odeur est unique, je hume ce compagnon de mes nuits, mon nez effleure les pages, me chatouille, un rire m�����chappe et mon ��rection soul��ve les draps.


Je d��pose le livre sur mon bas ventre, une sensation extraordinaire, mon p��nis qui atterrit entre les pages, qui effleure le papier lisse comme un orifice humide. Mon organe qui se gonfle de sang s���impr��gne de l���essence de ce bouquin.


Je le dis, et je le r��p��te, rien ne vaut un bon livre papier, son contact, son odeur, ses caresses. Lorsque j���asperge les pages de ma substance chaude, je repousse le livre, conscient que ma semence s��chera durant la nuit, tenant les pages coll��s ensemble.


*


Je reviens chez moi, apr��s une soir��e catastrophique. Une soir��e de No��l avec la famille, les oncles et les tantes, ma m��re encore vivante et les cendres de mon p��re dans un vase sur le foyer. J���ai re��u plusieurs cadeaux, mais le pire est celui que l���oncle Richard m���a offert. Je crois qu���il savait tr��s bien �� quel point j���ai en horreur ces choses impersonnelles et vulgaires. L���insulte que j���ai ressentie en ouvrant le cadeau, en d��ballant la bo��te, et de voir une tablette de lecture pour les livres num��riques. C�����tait comme d���offrir du chocolat pour le diab��tique, une vodka pour l���alcoolique en r��mission, un prix Nobel de paix pour un policier du Missouri. J���ai failli lui sauter �� la gorge, le mordre au nez pour le lui arracher, lui cracher le moignon ensanglant��. J���ai retenu mes pulsions meurtri��res, parce qu���il y avait trop de t��moins, parce que je ne suis pas un meurtrier.


Je suis maintenant au lit, et je repousse mon Stephen King de c��t��. Mon regard vogue vers cette chose noire qui repose sur ma table de nuit. La tablette re��ue. Richard qui m���annonce avec une joie perverse qu���elle est d��j�� charg��e de plusieurs livres. J���ai voulu jeter l���objet, mais je suis conscient du co��t de cette chose. Le gaspillage m���horripile. Que faire? Cette horreur me toise en silence, me d��fit par sa pr��sence impunie. J���h��site, et je m���en empare, avec la m��me expression qu���un pi��ton se penchant pour prendre de la merde de chien fra��che du bout de ses doigts non gant��s.


��J�����tudie l���objet en question. Je suis surpris par son poids, c���est tr��s l��ger. Le plastique est lisse, s���harmonise avec la temp��rature ti��de de la pi��ce. Mon doigt vagabond effleure une touche sur le c��t�� et l�����cran s���illumine. Je sursaute, le reflet de l�����cran illuminant mon visage grima��ant d���horreur. Les ondes qui ��manent de ce bidule peuvent-elles me donner le cancer? Br��ler ma r��tine? Me rendre st��rile? Comme le four �� micro-onde et le t��l��phone cellulaire?


L���image devant moi est celle d���une couverture de livre. Avec le nom de l���auteur, de la maison d�����dition et de la collection auquel appartient le livre en question. C���est donc cela, une tablette? Curieux de l���effet, je tends le bras et ��teins ma lampe de nuit. Malgr�� l���obscurit��, je peux continuer �� consulter le lecteur. Cela m���intrigue, comme une nouvelle voisine sexy qui vous sourit dans le couloir, de l���immeuble, vous fait des clins d�����il. Il n���y a pas de mal �� essayer, non? Je pr��f��re toujours le contact du livre papier, son odeur et son poids familier. Mais autant me prouver que cette pi��ce plastifi��e est aussi mauvaise que je le croyais.


Je tourne les pages, surpris de l���animation qui imite un vrai livre. Les mots sont facilement lisibles, je peux ajuster la clart��, la dimension des caract��res, souligner des passages entiers et laisser des notes. Tout cela sans le besoin de papier et crayons. C���est amusant, un peu comme un de ces ordinateurs avec lesquels j���ai peu exp��riment��.


J���approche la tablette de mon nez, je veux v��rifier l���odeur qui en ��mane. Celle du plastique un peu chaud, puisque la batterie et ma poigne humide r��chauffent l���objet. Ce n���est pas si mal. Cela me fait bri��vement penser �� l���odeur du cuir dans une voiture neuve, d���une tenue assez os��e en cuir avec fouet, rev��tu pour une soir��e excitante. Le m��lange de chaleur et d���odeur r��confortante me trouble. J���aurais d�� d��tester le contact, mais je l���appr��cie de plus en plus. Mon poignet me fait moins mal qu���en tenant un livre de Stephen King de 800 pages, je peux m��me rester coucher sur le c��t�� et tourner les pages d���un seul doigt, sans devoir remuer.


Je souris et me sens tout de suite coupable. Je ne peux pas aimer le num��rique, c���est mauvais, c���est l���incarnation m��me du mal. Une abomination qui menace ces livres papier qui me donnent des frissons de jouissances.


D���une main tremblante, j���approche la tablette de mon bas ventre. Elle ��pouse la forme de mon corps, effleure mon membre raidi avec douceur, la chaleur se diffusant dans tout mon corps qui s���arque d���une euphorie accusatrice. La luminosit�� de l�����cran se d��pose au plafond. J���approche mes doigts de mes narines, renifle les effluves de plastique qui s���attardent.


En fait, c���est avec une grande culpabilit�� que je retrouve un peu ce sentiment physique qu���apportent les livres papier. Plus l��g��re, la tablette est comme une jeune femme svelte, avec son parfum fruit��, ses courbes et ses lignes parfaites que les ravages du temps n���ont pas encore entam��. Sa chaleur m���attise, sa clart�� m���illumine. Je ferme les yeux et laisse le flot des ��motions couler comme la s��ve d���un ��rable au printemps qu��b��cois.


Je m���endors ce soir avec la certitude que je m�����tais tromp��.


Aucune page ne restera coll��e au matin, l�����cran se nettoie facilement.


Ma vie est �� tout jamais chang��e.




��Article int��ressant:


http://www.lapresse.ca/vivre/sexualite/201003/22/01-4263065-objectophiles-des-humains-qui-desirent-sexuellement-des-objets.php




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Published on December 15, 2014 07:28
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