Vite, un compromis !

En 2025, souhaitons à la France d’apprendre l’art du compromis. Le mot paraît grossier dans notre langue. C’est pourtant un exercice très noble. Surtout s’il s’agit de trouver un budget, si possible qui éponge la dette sans le faire payer aux plus fragiles : le réglage que doit proposer François Bayrou. Et le temps presse. Au lieu de se mettre entièrement dans les mains de Marine Le Pen, qui a prouvé son mépris de l’intérêt général malgré toutes les concessions de Michel Barnier, il devrait concéder une victoire symbolique au Parti socialiste.

Mais les socialistes, eux, sont-ils capables de sortir du confort de l’opposition systématique, de redevenir un parti de gouvernement ? Exiger l’abandon de la réforme des retraites (qu’ils auraient menée d’une façon ou d’une autre), c’est se moquer du monde… Mettre le pays en situation de devoir choisir entre la dégradation économique, faute de budget, et la dégradation économique, faute de réforme. À leur décharge, ils ont feint un pas. C’est donc à François Bayrou de leur proposer une alternative honorable, autre que l’enfumage de la conférence sociale.

Clairement, il mise plutôt sur le fait que le RN n’osera pas rejouer la carte du chaos dès la mi-janvier. Une impasse et une occasion manquée de détacher le PS de LFI. Ce qui ferait du bien à la gauche, mais aussi au pays. En face, c’est la faute du Parti socialiste, et à leur mésalliance avec LFI, si plus personne ne leur fait confiance.

En réalité, il est terrifiant de se dire que notre sort économique dépend du talent stratégique de François Bayrou et de la grandeur d’âme d’Olivier Faure… Pourtant, malgré eux, il faut souhaiter qu’ils trouvent un compromis. Dans l’intérêt du pays.

Un compromis, ce n’est pas se compromettre. Se compromettre, c’est trahir ses fondamentaux. Pour le RN, il n’y a rien de salissant à ne pas censurer le budget d’un gouvernement qui compte trois ministres de l’Intérieur en béton armé, et une ancienne fan de la Manif pour tous à la Famille. Pour le PS, il ne devrait pas être déshonorant de laisser passer le budget d’un gouvernement qui a placé Éric Lombard à Bercy, et compte trois  anciens socialistes. Contrairement à ce que répète en boucle la meute du NFP, ce n’est pas Valls qui a trahi la social-démocratie, mais Olivier Faure. C’est lui qui a passé un pacte avec le diable LFI, lui qui a transigé sur tous les principes pour quelques sièges et une gamelle. On peut moquer la souplesse partisane de Manuel Valls, naviguant entre le centre droit et le centre gauche, la France et l’Espagne, il reste en revanche absolument fidèle à sa ligne de fond : républicaine et responsable. Alors que le macronisme a dynamité tous les repères, que la droite ne sait plus si elle est nationaliste ou gaulliste, et que le PS tourne le dos à Léon Blum, c’est assez rare pour être souligné. Pour se guider, les boussoles ont plus de sens que les étiquettes. C’est la différence entre le compromis et se compromettre.

Caroline Fourest, Franc-Tireur, 2/1/25

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Published on January 02, 2025 05:58
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