La vie d’un écrivain – Scénario 3

monsters-hallway_00259357.jpgRomulus courrait sans vraiment regarder devant lui. Il guettait la chose le pourchassant, dont il pouvait entendre le rire sadique, les pas sourds et le souffle rauque. L’obscurité ambiante l’empêchait de bien distinguer sa destination, d’éviter les obstacles et il chuta contre un tabouret, percutant lourdement le sol à la moquette odorante. Il cria de terreur, craignant que la chose le rattrape. D’une poussée de ses jambes, utilisant tout son courage et sa détermination, il parvint à se relever. Il devait trouver la sortie, chercher le refuge de l’extérieur et lutter contre l’oppressante claustrophobie qui le tenaillait.


La situation n’avait rien à avoir avec ses romans sombres, ses récits captivant les lecteurs. Écrivain d’horreur, Romulus se retrouvait aujourd’hui dans un scénario macabre digne d’un film de « slasher ». La bête meurtrière lui était tombée dessus sans avertir et ses intentions ne faisaient aucun doute. Elle voulait l’éliminer, le faire payer une quelconque injustice contre sa race d’êtres démoniaques et imprévisibles. Debout, le jeune écrivain se toucha le visage, découvrant une protubérance douloureuse. Ce n’était pas sa seule blessure. Le monstre l’avait frappé au ventre, au visage, brisant ses lunettes. Son dos lacéré et son cou parcouru de marques témoignaient de l’intensité de son combat.


Un grondement lui vint du couloir à l’obscurité opaque et sans réfléchir, il se mit à courir dans le salon, cherchant à atteindre la cuisine et sa porte donnant sur la cour arrière. Le ciel étoilé l’accueillerait, le vent frais lui ferait grand bien.


Mais cela aurait été bien trop facile. La vie était parfois une grosse salope, vous réservant de désagréables surprises. Dans sa course folle vers la sortie et la liberté, il ne vit pas la chose moqueuse dissimulée derrière le canapé et qui le fit trébucher. Il se retrouva à nouveau au sol, incapable de se relever. La bête lui tomba dessus, bavant d’excitation, grognant du plaisir pressenti à dévorer sa chair, lui arracher son cœur ou encore le défigurer. Il chercha à repousser le monstre, mais ce dernier tentait d’atteindre son visage, hurlant d’un plaisir de prédateur si près du but. Il sentait ses crocs frôler son visage, ses membres racornis et velus griffant sa chair, cherchant à le blesser.


Il ne s’en sortirait pas. Ce combat était perdu d’avance.


Une voix forte et autoritaire s’éleva du couloir, immobilisant les deux adversaires au sol.



Romulus! Arrête tes conneries.

L’intéressé, à bout de souffle, se redressa, tenant la chose remuante et toute chaude dans ses bras.



Mais voyons, chérie, on s’amuse.
La dernière fois vous m’avez brisé un vase. Tu écrivais encore?

Romulus observa son petit garçon, au sourire lumineux. Le petit aimait bien les jeux de papa, comme lui courir après pour faire semblant de le manger, comme le grand méchant loup. Il répondit à sa femme.


Rosalie soupira, avant de secouer la tête.



À table. Le repas est prêt. Et pas de course dans le couloir, compris?

Le monstre au pyjama de Batman s’agrippa à son père, direction la cuisine.


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Published on July 15, 2016 09:18
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