Le bilan de l'année : des chiffres et de l'émotion.


J'avais décidé, cette année encore, d'en faire moins. De m'accorder plus de temps pour l'écriture (que je concentre le plus souvent entre fin juin et décembre). De dire plus facilement "non", éviter d'enchaîner les salons toutes les semaines. Et puis, il y a eu La Drôle d'évasion, (18 sélections), Quelqu'un qu'on aime (9 sélections), Il était deux fois dans l'ouest (10 sélections), Huit saisons et des poussières aux Incos... des invitations qui venaient de partout, enthousiastes et sincères. Alors, j'ai dit oui, pas toujours, mais presque. 
Pour le dernier déplacement en province, Jérôme m'a dit en me déposant devant notre petite gare de banlieue ouest (que nous quittons bientôt) : "T'as déjà fait le compte ? De tes voyages, des kilomètres parcourus, des nuits d'hôtel, des classes rencontrées ?".Non, je n'avais jamais pensé à chiffrer tout ça, puisqu'on le sait bien, tout n'est qu'affaire de sourire, d'émotion brute, de partage et de chaleur humaine. 
L'idée a fait son chemin, et j'ai commencé à faire des listes, des comptes, calculette en main. J'ai trouvé ça drôle, un poil vertigineux, entre nostalgie (ben, oui, j'adore ça) et soulagement (quand même, c'est fini pour quelques mois et c'est bon de rester chez soi, aussi).
Alors, voici un bilan chiffré de neuf mois dans la vie d'une auteure jeunesse, entre octobre et juin 2016. 
Nombre de salons : 14Nombre de salons où j'ai retrouvé mes deux amies, Sandrine et Anne-Gaëlle : 1Nombre de déplacements en province : 19Nombre de déplacements en région parisienne : 24Nombre de kilomètres parcourus en voiture pour  des rencontres : 2582Nombre de kilomètres parcourus en train : 10 524Nombre de salons ou projets annulés (attentats / grèves / intempéries) : 4Nombre de nuits d'hôtel : 32Nombre de nuits d'hôtel horribles pour cause de matelas défoncé : 2Nombre de nuits d'hôtel horribles pour cause d'étudiants qui font la fête le jeudi soir : 1Nombre de nuits d'hôtel horribles pour cause de voisine à la sexualité bruyante : 1Nombre de nuits d'hôtel horribles pour cause de voie ferrée très proche : 2Nombre de poils de l'occupant précédent retrouvé dans la douche de la chambre d'hôtel : 1Nombre de croissants proposés au petit-déjeuner : 32Nombre de croissants avalés : 1 (yes !)Nombre de fois où on nous a dit "Y'a vraiment que la table des auteurs et les illustrateurs pour nous demander de couper BFM TV au petit déjeuner !" : 1Nombre de trains pris à 5h24, en gare de La Verrière : 3Nombre de prix gagnés : 12Nombre de chèques reçus pour un prix gagné : 2Nombre de sélections : 45Nombre d'articles parus sur QUELQU'UN QU'ON AIME : 156 (et je ne m'en lasse pas, émotion à chaque fois)Nombre de T dans l'article de Michel Abescat (Télérama) à propos de  Quelqu'un qu'on aime : 3Nombre de bonds faits dans mon salon quand j'ai lu cet article : 5 ou 6 (associés à des petits cris de fouine)Nombre de romans parus : 3Nombre d'albums parus : 5Nombre de romans premières lectures  parus : 3Nombre de BD adulte parue : 1Nombre de conte paru : 1Nombre de texte en presse : 1Nombre de méthode de lecture co-écrite : 1Nombre de livres écrits dans le train / à l'hôtel : 0Nombre de livres écrits à la maison : 6Nombre d'ateliers d'écriture ponctuels : 3Nombre d'ateliers d'écriture sur plusieurs mois : 3Nombre de classes rencontrées : 133Nombre de classes rencontrées qui avaient préparé la rencontre avec enthousiasme : 128Nombre de rencontres "skype" : 8Nombre de classes qui n'avaient lu aucun livre : 1Nombre de classes qui avaient lu un livre mais à qui l'enseignante n'avait même pas dit que je venais : 2Nombre de fois où la maîtresse m'a dit :"On n'a rien pu préparer, c'est la fête des mères !" : 1Nombre de fois où j'ai failli partir : 1Nombre de classes où j'ai pleuré d'émotion à cause de surprises préparées, écrites, offertes pour la rencontre : 4 (de vraies larmes qui coulent)Nombre de classes où j'ai pleuré à cause d'une question qui me retourne : 2Nombre de classes où on a bien rigolé : 129Nombre de classes où l'enseignante a corrigé ses fichiers de maths pendant l'échange : 1Nombre de classes où j'ai fait comprendre à l'enseignante qu'il fallait qu'elle arrête ça tout de suite : 1Nombre de fois où on m'a dit : "Ah bon ? Vous êtes payée pour venir rencontrer vos lecteurs ? Je vais voir ce que je peux faire mais je ne vous promets rien. C'est la première fois qu'un auteur me demande ça." : 1Nombre de fois où un enfant m'a donné une idée que je vais utiliser dans un livre : 1 (coucou Lawry !)Nombre de fois où un élève m'a dit que j'avais "grandi" depuis la photo du programme : 1Nombre de fois où un élève m'a dit que j'avais "vieilli un peu" depuis la photo du programme : 1Nombre de fois où un élève m'a demandé pourquoi j'avais les "cheveux plus jaunes avant" : 1Nombre de fois où un élève m'a demandé mon "06" : 2Nombre de fois où un conseiller pédagogique m'a demandé mon "06" : 1Nombre de fois où on m'a demandé pourquoi il y a des gros mots dans mes livres : une dizaine, à vue de  nez.Nombre de fois où je suis tombée dans une flaque d'eau dans la cour de l'école : 1Nombre de fois où j'ai fait tomber mon sac par terre et que ma trousse de toilette s'est répandue en classe : 1Nombre de fois où l'enseignante a (discrètement) ramassé le tampon qui avait roulé sous la table d'un élève : 1 

Nombre de fois où on m'a refusé un café en salle des maîtres "chacun apporte ses propres capsules, pensez-y la prochaine fois !" : 1 Nombre de fois où on m'a accueillie avec le sourire, un café, un thé, et même des petits gâteaux : presque toutes les autres fois. Nombre de fois, où une élève a vraiment pensé que je me faisais payer en "petits morceaux de fromage" par mes éditeurs, après lui avoir expliqué le partage du prix du livre à l'aide d'un camembert dessiné au tableau : 1Nombre de fois où un enfant m'a dit : "Ton roman, c'est le premier livre qu'on a à la maison" : 1


Je ne compte pas les fois où ...-J'entends : "Ce livre-là, c'est le tout premier que mon fils / ma fille a aimé !" -On me raconte qu'un de mes livres a de l'importance dans une famille, qu'une phrase est devenue une phrase "à eux", que ce livre est devenu le leur. -Les enfants veulent une signature sur leur bras ou leurs mains-Un(e) enseignant(e) / un(e) documentaliste / un(e) médiathécaire verse une petite larme pendant la rencontre (j'ai sans doute les larmes aux yeux aussi)-Le livre d'un de mes collègues m'épate, me fait rire, me bouleverse. -J'ai l'impression d'être en colo lors d'un salon-Retrouver des copains auteurs, illustrateurs m'a redonné le sourire après les attentats.-Les écrits des enfants m'ont surprise, remise d'aplomb, guidée. -Je ne voulais plus repartir tellement c'était bien d'être là, à parler des livres et de la force que ça donne. -J'ai été épatée de voir le travail que font les libraires, les documentalistes, les enseignants, les médiathécaires, les bénévoles lors des salons... -Je me suis dit que cet éditeur-là, cette éditrice-là, j'avais de la chance de l'avoir à mes côtés. -Je reçois, parfois longtemps après la rencontre en classe, des cartes, des dessins, des productions d'écrits dans ma boîte aux lettres... des mails, des messages privés, des commentaires sur mon blog. -Je réalise à quel point rencontrer des classes, des lecteurs, donne, tout simplement, du sens à ce que je fais. 

Pour cette année, c'est presque fini. Il reste quelques rencontres skype, une restitution d'ateliers (à Trappes) et une remise de prix (à Jouy-en-Josas).
C'était une année dense, riche, étonnante, incroyable. Je suis fatiguée, ah oui, épuisée même. J'ai un peu de retard, deux romans à rendre (un à la fin de l'été, l'autre fin octobre), de belles nouvelles à annoncer pour des parutions à venir, des projets, une expérience vraiment nouvelle qui s'offre à moi... Je suis heureuse que ça se termine, soulagée.
Mais déjà, je sais qu'après des mois d'écriture,  reviendra l'envie de repartir, de reprendre le train, d'entrer dans une classe, de voir les sourires, d'écouter, de rire ensemble, d'échanger, de lire à haute voix, de répondre à mille questions, d'accepter un café, de refuser le croissant, de découvrir les livres des collègues dans le train du retour, de dormir dans des chambres d'hôtel un peu loin de chez moi. Parce que même quand le matelas est mauvais, les rêves sont doux. 

MERCI. 


























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Published on June 19, 2016 05:54
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Séverine Vidal
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