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C’était comme une seule et même conversation qui ne s’arrêtait jamais, pas même quand nous étions séparées, pas même le premier Noël que nous fêtâmes chacune de notre côté. Pour ma part, la conversation avec Johanna continua bien après son départ. Peut-être n’a-t-elle jamais vraiment cessé.
Le moi n’est rien d’autre que cela, le soi-disant « moi » : les vestiges laissés par les personnes contre lesquelles nous nous frottons. J’aimais les mots et les gestes de Johanna, et je leur permis de devenir une partie de moi, consciemment ou non. C’est sans doute cela le cœur de nos relations, et c’est sans doute la raison pour laquelle, en un sens, elles ne sont jamais terminées.
je compris que j’avais eu tort, que nous plaquons les calculs après coup sur nos impulsions, les chiens fous, les chiens sauvages qui guident en réalité nos vies.
avec l’espoir que le passé disparaîtrait si seulement on prenait soin de le catégoriser avec une attention suffisante.
J’ai eu dans ma vie une bonne dose de magie, le plus souvent dans mes rencontres avec autrui. Il y a quelque chose là-dedans, et uniquement là-dedans. Je ne peux pas être plus précise que ça : si l’on cherche quelque chose, c’est dans les autres que cette quête doit se poursuivre, et nos paires d’yeux sont les deux-points transversaux qui se dressent entre nous, pour entrer en l’autre, ou en sortir.
Quand je suis fiévreuse ou amoureuse, tout semble évident, mon « moi » se retire et laisse la place à un bonheur sans nom, un tout dans lequel les détails sont préservés, inséparables et pourtant distincts, comme placés les uns à côté des autres. Après coup, je me rappelle cet état comme un état de grâce.
Je nourrissais autrefois l’illusion que je ne pourrais me sentir pleinement vivante que dans la forêt, en flânant entre les hauts pins, assise en solitaire sur une souche, le soleil dans les yeux, ou sur une falaise au bord de la mer avec une vue magnifique, et que je devais sortir dans le silence des éléments pour être totalement éveillée. Il s’avéra ensuite que tout était déjà là, dans les détails qui m’entourent, qu’il s’agissait d’une méticulosité dans le regard sur toute chose, qui me permettait de lâcher prise et de concentrer mon attention sur l’extérieur, vraiment. C’est là que je me
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