Deux hommes dans la force de l’âge. L’un éditeur, l’autre romancier. Ils occupent la scène publique, accèdent au sommet de leur carrière. Ils ont convenu de publier une nouvelle édition du roman à succès Le batailleur, que le créateur pourra retoucher de bon gré. Un contrat est signé, que le romancier finit par contester en justice. Le procès dure quinze ans. Avec leurs avocats, ils seront quatre face au juge.
Avec ce roman incisif et saisissant, France Théoret dissèque au scalpel la suffisance, la domination et le mensonge de la joute masculine qui s’affirme par la virilité intellectuelle. Les querelleurs fait le récit d’un procès littéraire, mais inculpe au passage une littérature dominée par les hommes.
France Théoret, poète, romancière et essayiste, est née à Montréal en 1942. Elle y a fait des études primaires, secondaires et un brevet de pédagogie à l’École normale Cardinal-Léger (1957-1959). Après une année d’enseignement au niveau primaire (1960-1961), elle a obtenu un baccalauréat ès Arts du Collège Marie-Anne Annexe (1965) et une licence ès lettres de l’Université de Montréal (1968). Elle a étudié à l’École pratique des hautes études à Paris de 1972 à 1974. Elle a obtenu une maîtrise ès Arts de l’Université de Montréal en 1977 et un doctorat en études françaises de l’Université de Sherbrooke en 1982. Elle a enseigné au niveau collégial, de 1968 à 1987. Depuis elle se consacre entièrement à l’écriture.
Ce roman nous plonge au centre d’un procès autour d’une réédition que l’écrivain juge abusive, voire frauduleuse. Le monde dépeint est froid, rigide, distinctement masculin — tous les personnages sont des hommes — et la prose est sèche, presque austère. J’ai trouvé l’ensemble étonnamment ennuyeux (bien que ce soit pourtant assez court comme roman). Le propos m’échappe : voulait-on montrer les contradictions des protagonistes? Dénoncer le milieu littéraire? Les personnages, souvent grossièrement caricaturés, n’ont suscité chez moi qu’une indifférence tenace.
Après un début très prometteur, une mise en situation très bien plantée, des personnages originaux dessinés à coups de crayons très précis, la suite s'enfonce dans des répétitions à n'en plus finir... Bien sûr, ces répétitions servent à représenter l'absurdité d'un procès interminable, le narcissisme vain des personnages masculins et leurs points de vue particuliers, mais mon intérêt n'a malheureusement pas été maintenu passé le milieu du livre... Je n'ai pas trouvé à m'accrocher à un élément en particulier pour vraiment apprécier. Le type de narration, froide et incisive, y est sûrement pour quelque chose. J'aurais quand même pu donner 3 étoiles et demi.
J’écris ce début de critique après avoir fini de rédiger ce qui s’en vient, car j’ai été surpris de la tournure de l’exercice. Ce n’est pas une lecture que j’ai particulièrement appréciée; pourtant, au moment de l’analyser, je lui trouve plusieurs points positifs. Il n’en demeure pas moins que si certains éléments étaient appréciables, j’ai terminé ce roman avec une déception équivalente à celle d’avoir mal choisi son repas sur le menu, sans pour autant qu’il soit mauvais.
«Les Querelleurs» est essentiellement, presque entièrement, l’histoire d’un combat judiciaire entre un éditeur et un auteur. Après avoir convenu de publier une nouvelle édition d’un roman qualifié de chef-d’oeuvre, ils se déchirent lorsque l'écrit encaisse un échec majeur. Il y avait certes un contrat, mais la liberté artistique devrait-elle trôner à un point tel qu’un auteur puisse stopper la publication d’une oeuvre achevée?
Parfois, on a pitié pour l’éditeur, devant cet auteur qui regrette une oeuvre sur le tard, submergé de critiques négatives, et qui tente d’invalider un contrat signé en bonne et due forme. À quel moment a-t-il décidé de ne plus assumer son oeuvre? Avant d’y mettre le point final, en la relisant une dernière fois ou maintenant qu’elle n’est pas acclamée comme il l’espérait?
Puis, on s’offusque devant cet éditeur qui pense davantage à l’argent qu’à l’héritage d’une oeuvre, qu’à la marque d’un romancier ayant écrit l’histoire par le passé. L’auteur n’est pas satisfait de son oeuvre? Contrat, pas contrat, il devrait pouvoir se retirer pour protéger son intégrité artistique, non? On ne peut pas enfermer un génie dans un cadre aussi rigide, contractuel.
Ensuite, on penche de nouveau du côté de l’éditeur, car l’auteur n’a jamais exprimé clairement ses appréhensions. Combien de temps devait-il attendre? Comment entendre ce qui n’est jamais dit?
Bon, on est de retour dans le camp de l’auteur, dont la vie s’est écroulée après cet échec. Quelle vie ingrate que celle de l’artiste, qui peut atteindre des sommets et toucher le fond d’une oeuvre à l’autre!
Jamais, je n’ai pris pleinement le bord du plaignant ou du défendeur. Les deux ont leurs torts et leurs vérités. Surtout, l’un et l’autre sont suffisants et détestables. En alternant entre ces deux narrateurs, on décide que ni l’un ni l’autre ne nous méritent. On se demande aussi s'il est possible qu’un conflit n’ait pas une victime et un coupable, mais bien deux victimes et deux coupables. À parts égales? Et le juge est contraint de trancher...
Il y a aussi les avocats stéréotypés. L’un est à cheval sur chaque virgule de sa bible criminelle; l’autre aime parler fort, faire des métaphores et jouer le théâtre de la justice.
En fait, ce livre est un regard sur un système judiciaire souvent décevant et obligé de trancher – la leçon la plus pertinente de ce texte, à mon avis. Un regard sur une relation affaires-arts toujours aussi compliquée. Un regard sur l’estime de soi, dosée dans ses deux extrêmes. Tout cela en fait tout de même un récit pertinent. Semble-t-il qu’il y ait aussi un message féministe, à en croire la quatrième de couverture, mais je ne l’ai pas perçu. Sinon que la femme est absente du roman.
Comme lecteur, je cherche à être touché et ce ne fut pas le cas. J’ai fini ce livre (très court) en étant heureux de le refermer, mais cette oeuvre n’est pas inutile. Elle lance un message, pose un constat.
Pour les lecteur.rice.s de plaisance, l’avertissement est lancé. Si vous aimez lire des essais ou détester des personnages, par contre, c’est peut-être une grande oeuvre.
J'ai tellement eu de plaisir à lire ce court livre de France Théoret.
Bataille d’égo entre deux hommes d’âge avancé qui croient si fermement en leur supériorité qu’ils en sont aveuglés, aveuglés au point de lutter pendant des années, simplement pour avoir le dernier mot.
J’ai été légèrement agacé par les sous-entendus féministes. Les allégeances philosophiques des protagonistes sont si clairement et habilement démontrées par l’autrice qu’il était superflu d’en ajouter. La tentation était probablement trop forte pour cette féministe convaincue.
D’ailleurs, pour l’avoir entendue en entrevue, madame Théoret n’a sûrement pas eu à puiser trop loin dans son imaginaire pour dégoter des personnages si impressionnés par leurs réalisations. Dans les premières minutes de l’entrevue, elle a dit (avec un ton de fausse modestie): « J’ai reçu une récompense officielle… », « j’ai fondé un journal des femmes… », « j’ai… », « j’ai… », « j’ai… », « j’ai… », etc.
Cela dit, je le répète, LES QUERELLEURS m’a séduit.
« Il a gagné ses procès grâce à son sens de l’organisation. Pour résumer, il dit, sa méthodologie. Son hygiène mentale n’a d’égale que son hygiène physique, y compris son hygiène morale, jusqu’à son hygiène sexuelle. De cela, il entretient son avocat Me Benoist, piégé par son imbroglio conjugal et réduit à des rencontres dans des bars. Rien de tel que d’avoir chez soi un service sexuel fiable, régulier. Son savoir-faire ne le trompe pas… »
Des réflexions légales intéressantes sur le milieu de l'édition et les droits liés à la création, mais le style est particulièrement aride à mon sens, tous les personnages m'ont semblé désagréables, j'ai l'impression que c'était parfois caricatural (de façon voulue ou non?), bref je ne sais pas trop quoi penser de ce livre...
Bof [i actually change my mind. just analyzed it in class and wow France Théoret elle gère de ouf, parle du rapport au pouvoir à meme la langue, les mots, et surtout le rapport des hommes à la langue ancrée dans la certitude etc des barres à analyser]
3.5* Prise de tête entre deux hommes peu aimables, pour qui il est ardu d'être empathique. Dommage car le sujet de l'argumentaire est plus que pertinent !
Ce roman, je l’ai dévoré en une journée. Le style m’a beaucoup plus, surtout le ton qui me semblait faussement froid et objectif. J’ai vraiment senti à travers la narration une ironie et une moquerie parfois douce, parfois grinçante. L’histoire tourne autour de cinq protagonistes masculins pour lesquels il est impossible d’avoir une seule once d’empathie. Bien sûr, ça peut en rebuter certains·es, mais personnellement j’avais l’impression d’être complice de la narration qui ne semble pas les aimer davantage (je me projette sans doute un peu, mais c’est vraiment ce que j’ai senti). Il n’y a pas de protagoniste féminin à proprement parler, mais j’ai quand même trouvé que les femmes avaient une présence symbolique importante. C’est-à-dire que l’on comprend très vite que les hommes du roman ont bâti leur carrière et se sont élevés intellectuellement (bien que pour moi ce ne sont que des abrutis invétérés) sur le dos de leur femme et pire encore qu’ils l’ont fait comme si cela leur était amplement dû. Il y a aussi des répétitions dans le roman que je n’ai pas vu comme des longueurs, mais plutôt comme une façon d’insister sur l’absurdité et l’outrecuidance dans lesquelles s’embourbaient les personnages.