Thomas Desforges > Recent Status Updates

Depuis le commencement des temps et jusque dans l’infini du futur des hommes ont aimé des femmes sans le leur dire et le Seigneur les a aimés sans le leur dire, et le néant n’est pas le vide puisqu’il n’y a rien avant.

…le whisky et la morphine m’ont rendu insensible à la douleur de mon cœur empoisonné.

Le chaton miaule, il veut de la viande — il est lui-même un petit bout de viande tremblante — l’âme mange l’âme dans le néant universel.

…et je me souviens de ma propre mort imminente, quelle magie, quelle douleur : « Si je possédais encore mon moi miraculeux de nouveau-né, du temps où je me rappelais ce qui était avant ma naissance, je n’aurais pas peur de la mort, je saurais que c’est le même songe creux »

…l’ébranlement de mon âme quand je pense à ce que c’est que d’être un bébé, on regarde les grandes personnes, le mouvement et le bruit de leurs mains comme des ombres, pendant qu’ils discourent sur le temps et la responsabilité…

Le Temps est la forme de malédiction la plus pure et la moins chère qui soit.

Chaque fois que je me rends compte que je vais mourir, je ne comprends plus le sens de l’existence.

… dans mon lit cruel ; avec une unique fierté et une seule consolation ; mon cœur s’est brisé dans le désespoir général, il s’est ouvert intérieurement au Seigneur, j’ai adressé une supplique dans tout ce rêve.

J’écris ce livre parce que nous allons tous mourir — Dans la solitude de ma vie, mon père mort, mon frère mort, ma mère au loin, ma sœur et ma femme au loin, plus rien d’autre ici que mes mains tragiques, jadis protégées par un univers de douces attentions, désormais réduites à guider et disparaître à leur manière dans les ténèbres communes de notre mort global, et je dors seul et stupide …

JE PEUX DÉLIRER à ma guise, car tel est le titre de ce chapitre.

Raide, je vous dis, complètement raide. Aucune loi n’interdit de planer, non ? À quoi ça sert de ne pas planer ? À quoi bon ramper ?

Une soirée que j’ai passée à Denver… avant mon départ pour la côte… en guise de préambule. Je venais de comprendre soudain (j’avais vu un jeune Américain, exsudant le succès, monter dans un avion, c’était un cadre supérieur) que rien n’a d’importance en ce monde ; pas même le succès en Amérique, et que seul le vide attend la carrière de l’âme. J’ai quitté cet aéroport pour…

Comment se fait-il qu’aujourd’hui, lorsqu’un type bien habillé qui est plombier syndiqué, et un autre type en loques qui est coiffeur à la retraite se rencontrent dans la rue, ils pensent du mal l’un de l’autre, soupçonnent un flic, un mendiant ou quelque activité suspecte, pire encore, un homosexuel ou un drogué, un fourgueur de came ou un voleur, voire même un communiste, et ils détournent le…

En Amérique, aller à l’université est aussi banal que l’idée d’une prospérité qui vous attendrait au coin de la rue ; la fac est censée résoudre un problème précis ou répondre à toutes les énigmes, car on croit qu’il suffit d’y apprendre ce qu’on vous enseigne pour que tout le reste coule de source ; au lieu de quoi, et comme cette prospérité qui ne vous attend jamais au moindre…

— C’est aussi vieux qu’un cheval sur la ligne d’horizon, mais surtout ne laisse jamais ce cheval te rattraper, son cavalier est couvert d’un suaire.

… stupéfiant chez lui, et puis, ah il est tellement relax et normal que… il en devient parfois chiant, tu vois ce que je veux dire ?
Jack (riant) : Oui

Jack : Ed est l’un des hommes les plus formidables qui aient jamais vécu
Cody : Oui, tu as raison… ‘bsolument — en même temps ce qui me flanque par terre chez lui, c’est qu’il est complètement normal, complètement — je veux dire, tu me suis — t’es d’accord, non ? Tu le surprendras jamais à, euh, faire un truc bizarre, ou une réflexion surprenante — tu vois — c’est ça le plus …

… tournes vers le passé pour te rappeler une pensée clairement formulée, délimitée, cadrée, tu comprends ce que je veux dire, la deuxième, troisième ou quatrième fois que tu en parles, eh bien ça te vient différemment, et à chaque fois ça se modifie un peu plus jusqu’à devenir les mots mêmes que tu prononces,…

En fait, je me suis rappelé que j’avais déjà parlé de ce plumard, ou que j’y avais pensé concrètement, si bien que tout ce que j’ai fait ç’a été de me sou — de retourner vers ce souvenir, de retrouver une mouture de, ah, de choses pertinentes, de souvenirs, d’organiser ça linéairement, comme un squelette de mes pensées antérieurs, et tout le monde fait pareil, tu sais, quand tu te …

… sincèrement sur ce mot… à moins que j’aime pas cette expression seulement parce que je l’associe au fait que… Je parle d’un truc que je refuse aujourd’hui, ou sur lequel je ne me concentre pas correctement… enfin, ce que je veux dire… tu as certaines préoccupations… quand tu t’aperçois que tes paroles s’écartent de… ce que tu veux être…

Cody : Eh bien parfois on ne supporte plus cette expression, et moi, de la même façon, j’en viens à détester parler de tout ce qui est lié à « J’arrive pas à l’écrire » — c’est-à-dire à l’écriture en général… ou bien à l’objet qui…
Jack : Tu n’aimes pas cette expression ?
Cody : J’aime pas cette expression en tant que telle, mais je veux dire le — quand je me concentre …

Le samedi soir, c’est l’instant où ces obsessions qui nous hantent au-delà de tout langage et de toute pensée articulée acquièrent brusquement une tristesse qui implore la reconnaissance, mais personne n’y peut rien, et Cody pas plus qu’un autre ; aujourd’hui encore, plus vieux de quelques décennies, il s’en va, hanté, dans les rues du samedi soir de la ville américaine, les yeux arrachés…

… frémissant avant de mourir et d’encombrer la terre.

Ô vieillesse ! Ô l’affreuse goule hagarde de la décrépitude ! Ce fut d’abord un douc enfant crédule sous le toit de son père ; ensuite, baptisé et trompé par la vie, il acquit ce masque de chair dégoûtée qu’on appelle un visage, mais certes pas le visage espéré par l’amour, puis cette âme de fantôme souffrant et famélique qui traverse maintenant les cauchemards de l’existence en …

… qui s’infiltre par la porte fissurée des jours, si quelqu’un avait pu te dire, te faire comprendre : « Crains la vie, mais ne meurs pas ; tu es seul, mais comme tout le monde. Oh, Cody Pomeray, tu ne peux ni gagner ni perdre, tout est éphémère, tout est douleur. »

Oh, petit Cody Pomeray, s’il y avait eu moyen de t’adresser un cri, alors même que tu étais trop petit pour comprendre à quoi servent les cris et les mots sur cette terre sombre et désolée, submergé de terreur dans un monde aussi méchant et inhospitalier, avec toutes les insultes tombées du ciel pour nimber ta tête de colère, de souffrance, d’humiliation et, pire encore, de la pauvreté crapuleuse …

La voir partir ne me fait plus pleurer ni mourir de chagrin, car désormais tout s’éloigne de moi ainsi — les filles, les visions comme le reste, toujours de la même façon, et j’accepte ces séparations à jamais.
Tout m’appartient parce que je suis pauvre.

… quand vous retrouvez un authentique souvenir ancien, de la petite enfance, non pas un souvenir ayant pignon sur mémoire, une image souvent goûtée, mais un souvenir flambant neuf ! il a meilleur goût que le cognac de Napoléon que Stendhal lui-même a sans doute contemplé… en se rasant devant ces canons napoléoniens…